Le carreau de la mine de Faulquemont, entre préservation du patrimoine et reconversion économique
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Le carreau de la mine de Faulquemont a été labellisé en 2017 « Architecture contemporaine remarquable » par le ministère français de la Culture. Ce site, qui témoigne du riche passé industriel de la Lorraine, est aussi un espace de reconversion économique.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
08 déc. 2017
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Contexte historique
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La mine de Faulquemont appartient au bassin houiller lorrain. D'une superficie de 49 000 hectares, celui-ci se situe à l'est de la Moselle, dans un triangle formé par les villes de Faulquemont, Creutzwald et Stiring-Wendel.
C'est au début du XIXe siècle que le premier gisement de houille est découvert, donnant son nom au bassin. La houille est un charbon qui contient 75 à 90 % de carbone, ce qui lui confère un fort pouvoir calorifique, utile à l'industrie et au chauffage. Le fonçage du premier puits de mine du bassin a lieu en 1818, mais le manque de moyens techniques de l'époque empêche l'extraction du minerai. C'est en 1856, avec le fonçage du puits Saint-Charles à Petite-Rosselle, que débute réellement l'exploitation du charbon en Lorraine. 58 puits de mines sont foncés entre 1818 et 1987 dans le bassin houiller lorrain. L'exploitation connaît un déclin inexorable à partir des années 1970 et s'est définitivement arrêtée en 2004, mettant un terme à l'extraction du charbon en France.
Sur le site de Faulquemont, l'exploitation du charbon s'est développée assez tardivement, les couches de charbon étant beaucoup plus profondes que dans le Warndt. La société des Charbonnages de Faulquemont s'installe sur le site en 1920, la mine est ouverte en 1930, avec des puits foncés à plus de 500 mètres de profondeur. Le carreau de la mine, achevé en 1936, a été conçu non par un ingénieur, comme c'était souvent le cas, mais par l’architecte Léon-Joseph Madeline. En 1946, les mines de charbon sont nationalisées, le groupe d'exploitation Faulquemont-Folschviller est fondé à cette occasion.
A la fin des années 1950, le site, alors au plus fort de son activité, emploie près de 3000 personnes. En 1965, le siège extrait son record absolu, soit 1 243 270 tonnes de charbon. Puis l'activité connaît un lent déclin jusqu'à l'arrêt de l'exploitation en 1974, faisant du carreau de Faulquemont un des premiers sites du bassin houiller à cesser son activité.
Le reportage n'évoque pas le climat social tendu qu'a connu le site de Faulquemont lors de l'arrêt de l'activité : en 1968, André Bettencourt, ministre de l'Industrie, annonce la fermeture de deux sièges lorrains pour 1975. Or les difficultés d'exploitation spécifiques du site rendent le prix de revient du charbon de Faulquemont bien supérieur à celui du reste du bassin. Le site est alors tout désigné pour la fermeture. En 1971, les mineurs de Faulquemont occupent de façon « musclée » la Direction Générale des Houillères. Un important mouvement social s'étend à tout le bassin pour protester contre cette fermeture, les grèves et manifestations se succèdent ; mais finalement, «l'accord de Forbach» confirme la fin de Faulquemont pour début 1975. L'arrêt de l'exploitation du siège intervient le 27 septembre 1974.
Suite à la fermeture de l'exploitation, le démantèlement des deux chevalements puis des salles des machines, soulève de vives réactions et conduit à une campagne de sauvegarde. Le district urbain de Faulquemont, devenu propriétaire des lieux, mène la réhabilitation dès les années 1980 pour ne pas laisser le site devenir une friche industrielle, par le biais de l'Etablissement Public Foncier de Lorraine (organisme d'Etat chargé de l'aménagement industriel et commercial). Certes, la totalité des installations minières (chevalements et bâtiments d'exploitation) est démantelée, mais sont conservés les trois corps de bâtiments administratifs.
Au milieu des années 1990 commencent les travaux de réhabilitation. Les bâtiments conservés sont progressivement occupés par de nouvelles activités : organismes de formation, conservatoire automobile, société de communication. Autant d’activités tertiaires qui reflètent certes l’évolution des secteurs économiques, mais ne qui constituent bien souvent pas des débouchés pour les anciens mineurs.
Éclairage média
Par
Le reportage évoque, par le biais de trois interviews, trois aspects distincts : le passé minier du site, l'objectif de reconversion économique qui le concerne, et la question d'un patrimoine architectural et pictural à préserver.
L'ancien mineur interviewé au début du reportage, Lucien Antoine, évoque le quotidien du mineur. Les conditions de travail sont difficiles : travailler « au fond » est exigeant et dangereux. D'ailleurs, le bassin a connu plusieurs accidents dramatiques durant la période d'exploitation. Par exemple, en 1985, un coup de grisou au puits Simon à Forbach coûta la vie à 22 mineurs.
La solidarité est donc forte entre les mineurs pour faire face aux difficultés du métier. Et en dehors du travail, les mineurs se retrouvent, dans les cités ouvrières construites autour des carreaux du bassin, et autour de loisirs communs, comme par exemple le football. Une sociabilité partagée rythme la vie de chaque famille de mineurs. Au-delà d'un métier, être mineur est un élément constitutif de l'identité de chacun, avec le sentiment profond d'appartenance à un groupe soudé et unique : se forge ainsi une véritable identité ouvrière. Nous pouvons d'ailleurs ressentir cela dans les paroles emplies de nostalgie de Lucien Antoine.
Le plan charbonnier signé le 20 octobre 1994 qui mit fin à l'activité minière dans le bassin eut parfois des conséquences dramatiques : il institua la retraite à 45 ans avec 80% du salaire pour limiter le coût humain de la fin de l’activité ; mais cet arrêt précoce de l'activité professionnelle a conduit certains mineurs, privés de cette solidarité et de perspectives d'avenir, à l'alcoolisme, à la dépression, voire au suicide.
Le siège du carreau de la mine de Faulquemont représente un bel exemple d'architecture industrielle. Le visiteur entre sur le site par une large allée cavalière bordée d'arbres, débouchant sur un bâtiment composé d'une tour centrale de six étages et de deux ailes parfaitement symétriques. Ce qui est suggéré ici, c'est l'entrée dans un véritable « château industriel » avec un gazon aux motifs géométriques et une perspective soignée. Le hall d'entrée des anciens bureaux du siège, énorme volume sur trois étages pour suggérer la monumentalité, est orné d'une fresque murale composée de cinq panneaux représentant des scènes de la vie des mineurs. Ces fresques sont l'œuvre du peintre français Charley Garry, né en 1891, dont c’est une des œuvres-phares. Elles relèvent du principe stakhanoviste : le mineur est représenté comme un homme fort, au corps athlétique, symbole d'une industrie triomphante. Cette iconographie n'est pas sans rappeler la propagande stalinienne, qui exalte des corps d’ouvriers puissants et musculeux.
Le site contribue à la perpétuation de la mémoire minière, à la manière d'autres sites en Moselle : le musée de la mine à Petite-Rosselle par exemple. Par ailleurs, l'ensemble des archives des HBL et celles précédant la nationalisation sont réunies depuis 2012 dans le Centre des archives industrielles et techniques de la Moselle à Saint-Avold. La volonté de conserver les traces de l'activité minière est toujours prégnante dans la région. Elle s'accompagne néanmoins d'une volonté de proposer de nouvelles activités essentiellement tournées vers le tertiaire, afin d'assurer la pérennité économique de la zone. Cette labellisation constitue d'ailleurs pour François Lavergne, président du district urbain de Faulquemont, interviewé dans ce reportage, une opportunité pour accroître l'attractivité du site. En effet, la fin de l'activité en 1974 a conduit certains mineurs à changer de site, d'autres à changer de métier. Il fallait donc rapidement offrir de nouvelles perspectives d'emploi dans la zone, et attirer de nouvelles activités économiques. Les villes de Faulquemont et Créhange s'étaient en effet développées autour du site minier. Ainsi Créhange comptait 4000 habitants quand la mine était en activité. La fermeture du site a provoqué une diminution de la population pendant quelques années, avant que la politique de reconversion ne ramène la population environ au même niveau qu'en 1974.
L'accent est enfin mis sur la particularité que constituent les bâtiments conservés et leurs fresques, témoignage de l'activité minière du site mais aussi du passé industriel du département. L'architecture des bâtiments et les fresques qu'ils abritent ont permis au site d'obtenir le label “Architecture contemporaine remarquable” créé par le ministère de la culture, qui met en valeur le patrimoine des XXe et XXIe siècles. Ce label, qui a remplacé "Patrimoine du XXe siècle" en 2016, a un objectif didactique mais a aussi pour but la valorisation d’un patrimoine témoin de l’évolution technique, économique, sociale, politique et culturelle de la société. On trouve en Moselle une vingtaine de sites eux aussi labellisés « Architecture contemporaine remarquable », à l'instar de Bataville, ou de manière plus surprenante des montagnes russes en bois du parc Walygator.
Transcription
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