Discours du général de Gaulle à Dakar

26 août 1958
04m 22s
Réf. 00200

Notice

Résumé :

Du 20 au 29 août 1958, le Général effectue un voyage à Madagascar et dans les territoires africains pour présenter à ces pays le choix devant lequel ils se trouvent : ou s'intégrer dans une communauté française, ou prendre le chemin de l'indépendance. Une manifestation des indépendantistes est organisée lors du passage de De Gaulle à Dakar, capitale du Sénégal.

Date de diffusion :
26 août 1958
Personnalité(s) :

Éclairage

Un mois à peine avant le référendum qui doit doter la France d'une nouvelle constitution, le général de Gaulle réalise une tournée africaine (du 20 au 28 août) où il visite successivement Madagascar, Brazzaville, Abidjan, Conakry et Dakar (et partout, sauf en Guinée, il reçoit un accueil enthousiaste). A chaque halte, il souligne le choix proposé aux populations africaines à l'occasion de cette élection : la Communauté à forme confédérale ou l'indépendance.

Depuis son retour au pouvoir, à peine deux mois plus tôt, le Général doit en effet répondre aux interrogations de plus en plus pressantes des nouvelles élites africaines quant à l'avenir de l'AOF et de l'AEF. Pour de Gaulle, il existe une communauté de destin avec l'Afrique, restée fidèle à la France Libre pendant la Seconde Guerre mondiale. Ainsi, " l'homme de Brazzaville " propose-t-il la Communauté, c'est-à-dire l'expression institutionnelle d'un ensemble franco-africain au sein duquel la France conserve un certain nombre de compétences (et notamment sur le plan des relations internationales).

Ce document sonore - un montage - présente les grands moments de son discours de Dakar, où le général de Gaulle s'adresse énergiquement à tous et même aux " porteurs de pancartes " (exigeant le départ immédiat de la France). Le 28 septembre 1958 pourtant, tous accepteront cette nouvelle Constitution et intégreront la Communauté. Seule la Guinée refusera et deviendra immédiatement souveraine, mais sans plus aucune relation d'entraide avec la France. Pour tous néanmoins, un pas décisif vers une indépendance prochaine est franchi.

Aude Vassallo

Transcription

Charles de Gaulle
Je vois que Dakar est une ville vivante et vibrante. Je ne me passerais pas de la saluer en raison, d'abord, des souvenirs qui m'y attachent, en raison, aussi, des espérances que j'y ai placées. Je veux dire un mot, d'abord, aux porteurs de pancartes. Je veux leur dire ceci : " Ils veulent l'indépendance. Qu'ils la prennent le 28 septembre ". Oui, l'indépendance, que les porteurs de pancartes la prennent le 28 septembre prochain. Mais s'ils ne la prennent pas, alors qu'ils fassent ce que la France leur offre : la communauté franco-africaine. Qu'ils la fassent en toute indépendance, en toute indépendance de l'Afrique et de la France. Qu'ils la fassent avec moi. Qu'ils la fassent pour le meilleur et pour le pire. Qu'ils la fassent dans les conditions que j'ai évoquées d'une manière précise, en particulier l'autre jour, à Brazzaville, et dont je n'admets pas qu'on paraisse douter de leur précision ni de leur sincérité. Nous sommes à l'époque de l'efficacité, de l'efficience. Nous sommes à l'époque des ensembles. Nous ne sommes pas à l'époque des démagogues. Qu'ils s'en aillent, les démagogues, là où on les attend. J'ai dit ce que j'avais à dire. Je l'ai dit à Dakar comme ailleurs. Je salue Dakar et le Sénégal depuis trois cents ans lié à la France, et réciproquement. Je salue l'Afrique, l'Afrique qui est libre, l'Afrique pour la liberté de laquelle l'homme qui vous parle a fait tout ce qu'il a pu, et est prêt à continuer de le faire. Allons, la route est claire et la lumière est devant nous. A Dakar, on le sait. Je constate avec une certaine satisfaction qu'en tout cas, le sujet paraît vous intéresser. On dit : " De Gaulle, je constate aussi que quand il est là et qu'il parle, les choses sont précises, qu'on ne doute pas et qu'on ne s'ennuie pas ". Et ceci dit, je prends congé de Dakar. J'aurai préféré, bien sûr, que ce fut dans un silence plus complet. Mais je n'en veux à personne. Je tiens à répéter à cette Afrique que j'aime l'expression de mon amitié, l'expression de la confiance et de l'amitié de la France. Et je suis sûr que malgré les agitations systématiques et les malentendus organisés, la réponse du Sénégal et de l'Afrique à la question que je lui pose au nom de la France sera : oui, oui, oui. Vive le Sénégal ! Vive la République ! Vive l'unité franco-africaine ! Vive la France !