L'association marseillaise SOS Femmes battues accueille des victimes de violences conjugales
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Résumé
L'association SOS Femmes battues reçoit chaque jour à Marseille près de 1000 femmes en détresse. Outre un accueil téléphonique, cette association propose un hébergement aux femmes victimes de violences conjugales. Des femmes témoignent sous couvert d'anonymat. Une bénévole rappelle que toutes les couches sociales sont touchées et que la majorité d'entres elles ont entre 25 et 35 ans. Elle évoque leur silence et leur peur de se retrouver seules avec des enfants, sans abri ou dans une grande misère économique.
Date de diffusion :
18 nov. 1985
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- 00613
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Contexte historique
ParDocteur en Histoire contemporaine, Post-doctorant à Aix-Marseille Université
Publication : 03 déc. 2024
Ce reportage diffusé en 1985 est consacré à l’action de l’association marseillaise SOS Femmes battues, fondée par des militantes féministes pour venir en aide aux femmes victimes de violences conjugales. Les statuts de SOS Femmes battues ont été déposés en préfecture des Bouches-du-Rhône le 17 juin 1976, et l’association a pour objet de venir en aide aux femmes victimes de violences physiques et à leurs enfants, ainsi que tout mettre en œuvre pour que les femmes prennent conscience de leur oppression et deviennent ou redeviennent des personnes capables de se prendre en charge individuellement.
La naissance de SOS Femmes battues se produit dans le contexte de l’émergence, après mai 1968, de nombreux mouvements féministes, dont le plus connu est le Mouvement de libération des femmes (MLF) fondé à Paris en 1970, qui revendique la libre disposition de leur corps par les femmes et l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. Il s’agit clairement d’une volonté de remise en cause d’une société patriarcale dominée par les hommes. À la suite de l’élection à la présidence de la République de Valéry Giscard d’Estaing, souhaitant insuffler un vent de modernité dans la société française, est créé, en 1974, un secrétariat d’État à la Condition féminine confié à la journaliste féministe Françoise Giroud. Un an plus tard, en 1975, est ouvert à Clichy-sous-Bois, en région parisienne, le premier refuge en France pour accueillir les femmes battues et leurs enfants. À Marseille dix ans plus tard l’association SOS Femmes battues se porte au secours chaque année d’un millier de femmes. Elle assure un accueil téléphonique, à une époque où il n’existe pas encore de campagne nationale d’information sur la question des femmes battues, la première ne voyant le jour en France qu’en 1989. Lors de ses permanences, au sein de locaux mis à disposition par la municipalité dirigée par Gaston Deferre, l’association accompagne ces femmes dans leurs procédures judiciaires et constitue un lieu d’écoute essentiel des victimes. Enfin l’association tente d’héberger, du mieux qu’elle peut, quelques-unes de ces femmes en détresse ayant dû quitter le domicile conjugal. Ces Marseillaises sont victimes dans l’intimité de leur foyer d’harcèlement moral et psychologique, de violences physiques pouvant aller jusqu’au meurtre et de violences sexuelles pouvant aller jusqu’au viol et aux mutilations. Ce n’est que le 23 décembre 1980 qu’une loi définit précisément le viol comme tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte ou surprise
et lui confère le statut de crime. Cette avancée législative majeure fait suite au procès s’étant déroulé en 1978 devant la Cour d’appel d’Aix-en-Provence durant lequel l’avocate Gisèle Halimi a fait prendre conscience, en refusant le huis-clos des débats, à une large partie de la société française de la gravité du viol et de ses conséquences pour les victimes. Elle a en effet obtenu la condamnation à de la prison ferme des hommes ayant agressé sexuellement, en 1974 dans les calanques marseillaises, deux touristes belges Anne Tonglet et Araceli Castellano.
D’une manière générale, il apparaît que les auteurs et victimes de violences conjugales sont issus de tous les milieux sociaux, avec une surreprésentation des brimades psychologiques dans les milieux aisés et davantage de violences physiques au sein des classes populaires, avec une forte corrélation avec la consommation excessive d’alcool. Notons également que les femmes cadres hésitent davantage à porter plainte que d’autres catégories socio-professionnelles par peur des conséquences. L’association reçoit également des femmes de tous âges avec toutefois une majorité de Marseillaises de 25 à 35 ans. Il est parfois difficile de comprendre pourquoi une femme victime de violences conjugales reste des années voire des décennies avec son bourreau. La volonté de préserver le cadre de vie familial des enfants ou le manque d’indépendance économique et la peur du lendemain peuvent être convoqués. Mais il importe de comprendre que ces violences perpétrées par le conjoint ne sont pas continues et s’insèrent au contraire dans un cycle en quatre phases : lune de miel, tensions, explosion et repentance, entretenant chez la femme battue l’espoir d’un changement de comportement de celui qu’elle aime. L’emprise est aussi susceptible d’augmenter à chaque cycle pouvant même aller jusqu’à faire porter à la victime la responsabilité de ce qui lui arrive. Ce n’est qu’en 1999 que l’Organisation des Nations Unies (ONU) crée la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, désormais célébrée chaque 25 novembre. Avec l’avènement, en 2017, du mouvement #MeToo encourageant, à l’échelle internationale, la prise de parole des femmes victimes d’agressions sexuelles et de viols, les violences faites aux femmes sont devenues une priorité pour les pouvoirs publics, et la société dans son ensemble tolère de moins en moins de tels comportements. Toutefois, en 2023, plus de 200 000 Françaises ont encore été victimes de violences de la part de leur conjoint ou ex conjoint, et près d’une centaine en sont mortes. La région Sud-Provence Alpes Côte d’Azur figure malheureusement dans les premières positions de ce triste palmarès des violences conjugales et des féminicides. La mobilisation des forces issues de la société civiles demeure donc essentielle. Rebaptisée en 2021 Solidarité femmes 13, l’association marseillaise fondée en 1976 continue son combat en faveur des femmes victimes de violences conjugales et sexuelles.
Bibliographie
- Liliane Daligand, Les violences conjugales, Collection Que sais-je, Paris, PUF, 2023.
- Olivier Fillieule, Isabelle Sommier (dir.), Marseille années 68, Paris, Presses de Sciences Po, 2018.
- Erin Pizzey, Crie moins fort, les voisins vont t’entendre, Paris, Des femmes, 1975.
Transcription
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