Le fruit de l'investissement des acteurs locaux
Présentation
Avec l'élargissement de la notion de patrimoine et l'émergence du patrimoine régional, on assiste à l'arrivée de nouveaux acteurs sur la scène. Témoignant d'un fort attachement pour l'héritage régional depuis les années 70, la société bretonne a su trouver sa place dans le processus patrimonial. Aujourd'hui, la vitalité patrimoniale en Bretagne est le fruit de l'investissement des divers acteurs, particuliers, associations, collectivités territoriales, tout au long du processus patrimonial, de la conservation à la transmission. Le patrimoine breton se présente alors comme le fruit d'investissements, de luttes et de revendications. Tout en étant créateur de lien social, il se révèle être un lieu de rencontre des enjeux sociétaux.
Les initiatives des associations
L'importance du tissu associatif est l'une des caractéristiques durables de la société bretonne. Il suffit de rappeler, en ce qui concerne le secteur culturel, les patronages, clubs sportifs, groupes de théâtre amateur qui se créent dès la fin du XIXe siècle, attisés par la concurrence qu'entretiennent les maires et les curés.
L'investissement associatif face à la nécessité de promouvoir ou défendre un patrimoine s'affiche avec force dans ces documentaires. La Bretagne compterait près de 1000 associations patrimoniales au début du XXIe siècle (Jy Veillard, 2000). Elles conservent, restaurent, font connaître le patrimoine. Leur champ d'action est variable selon l'échelle de territoire : la commune, le canton, le pays, la région... La variété des thématiques ne cesse de s'accroître : si le bâti dominait les années 70, les initiatives autour du patrimoine industriel lié à l'histoire sociale d'une ville, puis le patrimoine immatériel qui insiste sur la diversité culturelle se font plus nombreuses depuis une dizaine d'années.
Les débuts
Le festival des Vieilles Charrues à Carhaix
La 4ème édition du festival des Vieilles Charrues débute ce soir. Durant trois jours Carhaix va vivre au rythme de la musique et du théâtre de rue. Ce festival, qui est né d'une plaisanterie entre amis, se veut éclectique et accessible à tous.
Beaucoup de films rappellent la même histoire : ils évoquent un élan parti d'un groupe de copains, de voisins « qui invitent les copains », désireux de promouvoir une idée ou de faire quelque chose ensemble pour que « les gens soient confrontés à leur patrimoine ou à leur culture », pour « mettre en valeur toutes les formes culturelles de Bretagne ». Mais ces projets entrent aussi dans un plan plus vaste, celui de lutter pour le développement de la région, de contrer le vide démographique et économique. Et cela marche ! Il suffit de voir le présentateur de télévision s'étonner lors d'une visite à Carhaix « dans une région qui s'est sentie longtemps oubliée, alors c'est pour cela que l'on voit des initiatives tout à fait étonnantes ». En effet, plusieurs de ces initiatives qui ont débuté modestement se sont imposées durablement sur la scène française et européenne.
Période glorieuse
Au cours des années 70, un important réseau associatif se développe dans le paysage culturel de la Bretagne en faveur de la sauvegarde et de la valorisation d'une mémoire orale riche et précieuse, que l'on aspire à partager. Aux côtés de La Bouèze apparaissent diverses associations se donnant également pour mission de raviver la mémoire de la région. La volonté de faire revivre une culture populaire bretonne est reconnue par les collectivités locales dans les fastes des années 80 et 90. Des associations telles que Dastum, nées d'initiatives individuelles, grandissent et salarient du personnel. La collecte est l'outil principal de ces associations engagées dans la préservation d'une mémoire fragile continuellement menacée d'oubli. La diffusion du patrimoine culturel et maritime en direction du grand public transite par des événements de grande envergure, tels que les rassemblements du festival du Chant de Marin à Paimpol et la fête des vieux gréements à Douarnenez. Lieux de rassemblement festifs et populaires, faisant vivre le patrimoine maritime, ils présentent une Bretagne ouverte sur le monde.
Prolongements
Des initiatives récompensées
Les 25 ans de l'association "Eau et rivières de Bretagne"
L'association "Eau et Rivières de Bretagne" fête ses 25 ans. Elle est de plus en plus prise au sérieux par les responsables politiques et scientifiques. Son combat initial était de protéger et faire revenir le saumon dans les rivières bretonnes, il s'est élargi à la protection de l'eau et de sa qualité. Interview de son secrétaire Jean-Claude Pierre.
Les Réserves naturelles en Bretagne
Depuis 1958, la SEPNB, Société pour l'Etude et la Protection de la Nature, développe un réseau de réserve naturelle, essentiellement des réserves ornithologiques, la plus anciennes étant celle du Cap Sizun, dans le Finistère, où les oiseaux bagués sont étudiés.
A l'image de « Bretagne vivante », qui compte 3 000 adhérents et emploie 40 personnes, d'importantes associations à dimension régionale se créent dans les années 80 et interpellent les pouvoirs publics. Qu'elles s'investissent dans la sauvegarde du patrimoine naturel, dans la réhabilitation de sites historiques, ou dans la collecte de la mémoire orale, elles reposent toujours sur les forces d'un solide réseau de bénévoles. Les actions de ces associations sont donc récompensées en étant reconnues d'utilité publique ou encore en se voyant décerner des prix d'importance majeure.
Le soutien des collectivités
A l'écoute des initiatives de la population bretonne en matière de protection et de valorisation du patrimoine, les collectivités locales s'engagent dans une posture de soutien. Le patrimoine, par son ampleur et sa diversité en Bretagne, est un véritable atout pour le développement du territoire. Les collectivités en ont bien perçu les enjeux, au croisement entre activités économiques, attractivité touristique, et affirmation de la région. C'est donc dans une démarche volontariste que les collectivités souhaitent contribuer à l'affirmation et la reconnaissance des héritages culturels de la région, en soutenant les initiatives particulières ou en proposant des mesures pionnières.
La Région Bretagne
Réseaux bretons : la Charte régionale
Retour en archives sur le combat pour la reconnaissance de la langue bretonne. Récemment, la charte européenne des langues minoritaires a remis ce thème sur le devant de la scène politique. En partie signée par le gouvernement français, elle a été rejetée par le Conseil constitutionnel. Josselin de Rohan, Kofi Yamgnane et Yves Le Serre s'expriment sur le sujet.
Les décideurs des décennies 50 et 60 ont privilégié les projets économiques (voir le Celib) et il faut attendre les années 70 et surtout 80 pour que les collectivités locales fassent de la culture et du patrimoine les objets privilégiés de développement du territoire et qu'ils favorisent les rencontres entre les initiatives privées et le secteur public. Les années 70 correspondent à la reconnaissance officielle de la personnalité régionale de la Bretagne par la charte régionale accordée par le Président Giscard d'Estaing lors du discours de Ploërmel, en 1977. On assiste alors au début de l'engagement de la Région dans les projets valorisant l'identité de la Bretagne, son dynamisme culturel, la richesse de son patrimoine, matériel comme linguistique. Dans la lignée de la charte culturelle de Bretagne, la loi Defferre de 1982, relative aux « droits et libertés des communes, départements et régions » et visant à réorganiser les relations entre l'Etat et les collectivités locales, va donner une plus grande liberté d'action à la Région Bretagne. Cette loi a permis également la formation du conseil culturel de Bretagne (1983) dirigé par Michel Denis et celle de l'Institut Culturel de Bretagne, association présidée par Per Denez et financée par le conseil Régional qui apporte son soutien à la culture bretonne.
Prolongements
Dans les conseils généraux
Le calvaire de Plougastel Daoulas
Le calvaire de Plougastel Daoulas (Finistère), construit au XVIe siècle pour conjurer une épidémie de peste, a été restauré. Sa rénovation a été confiée à des sculpteurs et tailleurs de pierres, qui ont en partie gommé l'usure du temps des statues.
Les conseils généraux consacrent des moyens importants au patrimoine des départements, à la fois en matière d'inventaire et de restauration, et en matière de valorisation et de sensibilisation du public. Parmi les centres d'intérêt des départements figurent en premier lieu les monuments historiques, le patrimoine rural non protégé, mais également le patrimoine naturel. Pour des projets de grande envergure autour d'édifices qui font l'identité du département, ceux-ci jouent la carte de la coopération avec la région et les municipalités.
Prolongements
Dans les municipalités
La mise en valeur du patrimoine entre également dans les missions des municipalités, à diverses échelles selon la taille de la commune. Les grandes villes privilégient les restaurations de prestige, créent les labels et favorisent les grandes aventures - les festivals le plus souvent - qui d'origine associative, d'abord soutenus par la seule foi de quelques bénévoles, gagnent dans un deuxième temps en audience, en professionnalisme, et en notoriété car la machinerie municipale s'y implique (C.Bart 2003). Les plus petites communes s'appuient elles aussi sur les associations patrimoniales pour mettre en avant une identité et créer un lien social parfois malmené par la démographie et l'économie. La télévision et plus particulièrement France 3 à travers le journal régional nous laissent parfois entendre des moments de cette politique. Certaines municipalités, à diverses occasions, n'hésitent pas à se lancer dans des mesures pionnières, telle que la mairie de Rennes, au travers des démarches en faveur du patrimoine immatériel initiées en 2010.