Honneur, Patrie, Algérie française

17 mai 1958
08m 56s
Réf. 01025

Notice

Résumé :

Document à chaud sur l'ambiance délirante à Alger pendant et après le 13 mai.

Type de média :
Date de diffusion :
19 mai 1958
Date d'événement :
17 mai 1958

Éclairage

La période allant d'avril à juin 1958 est un moment particulièrement intense dans l'histoire de France, et c'est l'Algérie qui est au cœur des événements qui font basculer la IVe République. Le gouvernement Gaillard tombe le 15 avril, et le pouvoir reste vacant quinze jours ; mais quand Alger s'aperçoit que c'est Pierre Pflimlin, un partisan des négociations avec le FLN, qui est nommé président du Conseil, des Européens et des militaires décident de s'emparer du gouvernement général de l'Algérie le 13 mai avec l'idée de porter au pouvoir le général de Gaulle, qu'ils pensent (à tort) être le meilleur défenseur de l'Algérie française. Un Comité de salut public rappelant la Révolution française est créé, dont le général Massu est président, et Léon Delbecque, un proche du général de Gaulle, conseiller technique de la Défense nationale. Tout est prêt pour l' « opération Résurrection », qui commence par la prise du pouvoir en Corse et se continue à Paris avec les discussions menées par de Gaulle lui-même ; il est nommé président du Conseil le 1er juin et fait une tournée triomphale en Algérie début juin, qui fait l'objet de plusieurs films (Voir Le général de Gaulle en Algérie).

Il s'agit d'un étonnant document produit par le SCA Algérie afin de favoriser le retour au pouvoir du général de Gaulle suite au 13 mai 1958 – il est daté du 19 mai 1958. Parmi les bizarreries de ce film semi-amateur réalisé à partir des rushes du SCA et développé dans l'urgence à Alger, on note un emploi très particulier du son, notamment des applaudissements et des cris de la population (Salan, Massu, Soustelle...), ainsi que de la voix du speaker, non professionnel – une seconde version existe, faite deux semaines plus tard au SCA Ivry avec le speaker officiel du SCA. En fait, le speaker est un officier du 5e bureau (Action psychologique) d'Alger, pour lequel le film a été réalisé. Ces différents éléments font de ce film un document à chaud sur l'ambiance délirante à Alger pendant et après le 13 mai, avec la mise en scène de la « fraternisation » des Européens et des « musulmans » et de la ferveur des populations orchestrée pour porter le retour au pouvoir du général de Gaulle : « Aux portes de l'abîme, ce sursaut national sauvera la France, et le général de Gaulle donnera à cette résurrection son retentissement mondial ». On le voit, le terme « résurrection », qui est le nom de code du coup d'Etat, est prononcé. Rappelant la Révolution française, le speaker indique que « Dix millions de Français se mobilisent au profit de la patrie en danger ». Ce film, qui avait donc une visée politique évidente, a été effectivement diffusé dans les salles de cinéma d'Alger à cette période.

Sébastien Denis

Transcription

(Musique)
Journaliste
A nouveau, le monde était dans la nuit, à nouveau le monde attendait un message de la France, à nouveau enfin, la France parle.
(Musique)
Journaliste
L’image que le monde attendait sort du plus profond de l’âme française. Il vient du coin le plus menacé de la France, il vient d’Alger.
(Bruit)
Journaliste
Aux grands Français, militaires et civils y joignent leur voix pour lui donner la force de retentir au-delà des mers jusqu’aux chaumières les plus reculées de la France ; et plus particulièrement vers cette chaumière où un homme qui incarne la France l’attend depuis plus de 10 ans. Aux portes de la ville, ce sursaut national sauvera la France, et le Général de Gaulle donnera à cette résurrection son retentissement mondial. Dans cet irrésistible élan, la France n’oublie pas ses morts, elle vient ici dire à ses enfants qui ont su accepter le sacrifice suprême, que leur mort héroïque n’a pas été vaine ; que le réveil de la France est purifié de leur sang, de leur don d’eux-mêmes et qu’ils sont morts pour que vive aujourd’hui. Elle fait ici le serment devant eux que demain vivra.
(Bruit)
Journaliste
Alger a donné l’exemple, parce que dans Alger se trouve réunie l’Algérie entière. C’est pourquoi, spontanément, comme en 1789, 10 millions de Français se mobilisent au service de la patrie en danger.
(Bruit)
Journaliste
L’union de ces 10 millions de Français se cristallise autour du drapeau, autour de l’amour de la patrie retrouvée. Et comme cette union est une union des cœurs, toutes les barrières artificielles dressées par les intérêts d’un système à jamais condamnés s’effondrent.
(Bruit)
Journaliste
Les bords de la méditerranée, où est née la civilisation du monde, le renouveau de la France part à l’assaut des montagnes à l’assaut des djebels. En écho, la montagne répond à la mer, la petite cité à la grande capitale.
(Bruit)
Journaliste
Groupés autour de leur chef, inclinés devant leurs morts, les montagnards répondent présents.
(Bruit)
Journaliste
Le grand cri réveille la plaine, galvanise la campagne. L’union est totale, le peuple de France montre son vrai visage.
(Bruit)
Inconnus
Algérie française, Algérie française….
(Bruit)
Journaliste
Une immense foule de toute l’Algérie se ressemble alors de nouveau à Alger. Des djebels et des plaines, des cités et des campagnes, des fermes et des usines, hommes, femmes, enfants, jeunes et vieux montent inlassablement vers le forum d’Alger. La France est en marche, nul ne pourra l’arrêter, elle marche vers la victoire, le jour de gloire est arrivé.
(Bruit)
Journaliste
Là, groupée autour de son armée, autour de ses chefs, autour de ses morts, elle respire à nouveau l’air galvanisant de la liberté.
(Bruit)
Journaliste
Et les femmes de France viennent joindre leur élan à celui de la foule, elles parlent, elles disent au monde que cette victoire n’est pas la victoire d’un jour ; qu’elle est la victoire de demain, la victoire de toujours, la victoire de leurs enfants.
(Bruit)
Journaliste
Le peuple de France ose enfin crier : vive la France !
(Bruit)
Journaliste
Unis par une même volonté, animés d’une même foi, sûrs de la cause qu’ils défendent, certains de la victoire, 10 millions de Français jurent ici de sauver la patrie.
(Bruit)