Bartholdi, sculpteur des idéaux et mythes républicains
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Le nom de Bartholdi est intimement lié à celui de la Statue de la liberté, mais il ne peut être disjoint de l’Annexion de 1871 et de la construction de la IIIe République. En revenant sur les traces colmariennes du sculpteur, on pénètre dans l’univers qui a construit ses convictions profondes.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
06 août 2018
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Contexte historique
ParProfesseur agrégé d’histoire-géographie au collège Elsa Triolet à Thaon-les-Vosges
Frédéric Auguste Bartholdi (1834-1904) est issu d’une famille protestante de la bourgeoisie de Colmar, un père conseiller à la préfecture, une mère musicienne. Orphelin de père très jeune, la famille s’installe à Paris où il étudie dans différents ateliers artistiques. Rapidement remarqué, sa ville natale lui commande la statue du général Rapp, héros d’Austerlitz. En 1855, à l’invitation de Jean-Léon Gérôme, pape de l’orientalisme, il se voit confier par le ministère de l’Instruction publique une mission d’étude des antiquités égyptiennes. Il en ramène carnets de croquis et photographies, témoignage ethnographique de l’Égypte et du Yémen du milieu du XIXe siècle. Surtout, ce voyage se révèle initiatique : il retient qu’une œuvre n’est pas isolée, qu'elle doit se penser dans son contexte et que le sculpteur doit se doubler d’un architecte. Il est par ailleurs fasciné par la force et la pérennité des statues, en particulier des colosses de Memnon. C’est là que s’enracine son goût pour la statuaire et que va naît un projet non abouti : élever à l'entrée du canal de Suez un phare imposant, La Liberté éclairant l’Orient.
Durant la décennie libérale de l’Empire, Bartholdi participe à la statuomanie ambiante – véritable vague d’érections de statues dans l’espace public pour y affirmer les hauts faits des « Grands Hommes » ainsi honorés – et répond à plusieurs commandes publiques, en particulier pour des fontaines publiques (Colmar, Reims, Bordeaux). Il fréquente également des hommes d’affaires et des intellectuels libéraux, souvent admirateurs des États-Unis. Parmi eux, Édouard de Laboulaye, professeur de législation comparée au Collège de France, l’un des promoteurs – mais non l’instigateur – d’un projet de statue que la France se propose d’offrir aux États-Unis pour le centenaire de leur déclaration d’indépendance (pour la référence à La Fayette, c’est complexe ; initialement, le projet était de célébrer la politique de Lincoln suite à l’abolition de l’esclavage ; il y eu ensuite « réécriture » de la genèse du projet). Pressenti pour réaliser ce travail, Bartholdi réalise une première ébauche en terre cuite dès 1870.
La guerre franco-prussienne met entre parenthèses le projet et constitue pour le sculpteur une véritable déchirure. Il combat dans la Garde nationale et puis aux côtés de Garibaldi à la tête de l’armée des Vosges. L’Annexion le plonge dans une profonde affliction qu’il compense en utilisant son art pour chanter la résistance et la liberté, deux idéaux qui s’expriment dans le Lion de Belfort – véritable sphinx face à l’éternité et image du droit victorieux de la force –, mais aussi dans l’ensemble des statues contant les gloires nationales (Vercingétorix, Vauban, Rouget de Lisle, mais aussi Champollion et Gambetta).
Son inclinaison artistique vers le symbolisme, ses convictions républicaines et son réseau d’amis le conduisent presque naturellement vers la franc-maçonnerie. Il est initié à Paris en 1875 en même temps qu’Alexandre Chatrian dans un atelier très particulier du Grand Orient de France : la loge Alsace-Lorraine fondée pour poursuivre le travail des huit ateliers alsaciens entrés en sommeil après l’Annexion. Il y retrouve de nombreux compatriotes dont Jean Macé, le fondateur de la Ligue de l’Enseignement.
Parallèlement, Bartholdi reprend le projet américain. Alors qu’il voyage aux États-Unis et découvre la rade de New-York, Édouard de Laboulaye, à la tête du Comité de l’Union franco-américaine, organise une vaste souscription à laquelle participe notamment Charles Gounod qui créé l’oratorio La liberté éclairant le monde. À partir de 1876, la phase de construction débute. Bartholdi travaille d’abord avec l’architecte et médiéviste Eugène Viollet-le-Duc, puis, après le décès de ce dernier, il recourt aux techniques nouvelles de l’ingénieur Gustave Eiffel. Un changement qui témoigne de la transformation des conceptions artistiques à l’œuvre en cette fin de XIXe siècle. Performance technique, c’est aussi une véritable attraction touristique : la tête de la statue est ainsi livrée au public lors de l’exposition universelle de 1878. Entièrement montée à Paris dans les ateliers de la Plaine-Monceau, elle est ensuite démontée pour être installée et inaugurée à New-York en octobre 1886.
Si Miss Liberty demeure indissociablement liée au nom de Bartholdi, elle ne doit pas en résumer une production largement inspirée par la défaite de 1871 et l’écriture du roman national.
Éclairage média
ParProfesseur agrégé d’histoire-géographie au collège Elsa Triolet à Thaon-les-Vosges
Le journal du 19/20 de France 3 Alsace diffusé le 6 août 2018 consacre un long reportage à Auguste Bartholdi, le « père de la Statue de la Liberté ». Le tournage est entièrement réalisé dans sa ville natale, Colmar, et il est construit sous la forme d’un dialogue entre la journaliste et deux intervenants, Isabelle Bräutigam, conservatrice du musée Bartholdi, et Emmanuel Lenys, architecte. Le montage choisit d’ouvrir et de fermer le reportage sur un même lieu : le rond-point nord de l’entrée de la ville sur lequel la municipalité a érigé en 2004 une réplique de l’œuvre la plus connue du sculpteur alsacien, La Liberté éclairant le monde.
Si Bartholdi a vécu l’essentiel de son temps à Paris, le reportage nous conduit sur trois lieux colmariens qui ont marqué sa vie. Le premier est sa maison natale, un bel hôtel particulier transformé en musée et dont l’entrée richement ouvragée témoigne de la richesse de la famille. Après avoir traversé des pièces dont le mobilier reconstitue les appartements bourgeois parisiens de la fin du XIXe siècle, la caméra suit Isabelle Bräutigam dans un espace consacré aux moulages, répliques et originaux de l’artiste. On devine à l’arrière-plan un Vercingétorix chargeant lors de la bataille de Gergovie, statue équestre en bronze installée en 1903 à Clermont-Ferrand, ainsi que, dans une vitrine, un Rouget de Lisle chantant La Marseillaise, moulage d’une statue installée en 1882 à Lons-le-Saunier, ville natale du père de l’hymne national.
Le deuxième lieu est introduit par une toile conservée dans les réserves du musée : elle représente la maison de vacances des Bartholdi, sur les bords de la Lauch, à quelques encablures du centre-ville. On la découvre ensuite avec l’architecte Emmanuel Lenys qui habite et a restauré cette belle bâtisse avec colonnade aveugle sur l’une des façades.
Enfin, c’est la ville elle-même qui donne à voir l’empreinte du sculpteur à travers ses productions. Le reportage ne choisit pas de montrer la statue du général Rapp mais une sculpture offerte par l’artiste, en l’occurrence une fontaine urbaine représentant un facétieux vigneron buvant au tonnelet (1869), à l'angle de la rue des Vignerons et de la rue des Écoles, dans une niche du marché couvert.
Au-delà de ces lieux et des œuvres, le reportage montre bien la dimension politique du travail du sculpteur. La caméra revient brièvement sur les visages de Vercingétorix et de Rouget de Lisle, glisse sur le Lion de Belfort et insiste sur une œuvre en terre cuite peinte peu connue présentée par Isabelle Bräutigam, La petite alsacienne au bouquet tricolore (1883), preuve de l’attachement de Bartholdi à l’Alsace mais aussi d’une certaine nostalgie. C’est l’une de ses sculptures allégoriques dont le message politique est patent.
La dernière partie du reportage est consacrée à son œuvre monumentale, La Liberté éclairant le monde, dont le musée possède la première esquisse, une terre cuite au profil de déesse antique piétinant des chaînes brisées. Réalisée en 1870, elle prendra sa taille finale et sa place en 1886 à l’entrée de New-York avant de revenir en 2004 sur un rond-point de Colmar.
Transcription
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