Un département, trois guerres, des expériences de guerre

«  Savez-vous pourquoi il y a des peupliers le long de l’avenue Philippoteaux (à Sedan) ? - Non ! – Pour que les armées allemandes puissent défiler à l’ombre » : cette blague régionale assez connue révèle l’importance de l’expérience de guerre de cette ville, et plus largement de ce département et de sa population. Cette expérience de guerre mais aussi d’occupation jalonne l’histoire des Ardennes pour la période contemporaine : envahies et occupées en 1814-1815, de nouveau en 1870-1873 (c’est d’ailleurs à Sedan que Napoléon III capitule après sa déroute et sa capture), encore entre 1914 et 1918, et enfin, comme la majorité du pays, de 1940 à 1944. Rien d’étonnant donc de trouver en cette terre ardennaise un centre d’interprétation consacré à cette thématique.

Le reportage a pour sujet la réouverture du musée Guerre et Paix en Ardennes en 2018, après que celui-ci a été fermé pendant une décennie et a même été menacé de fermeture. Néanmoins, grâce à la volonté politique du département des Ardennes et à l’énergie de son directeur, chargé des affaires culturelles et éducatives, la mission de remettre sur pied cet outil pédagogique de premier plan est confiée à la conservatrice Marie-France Devouge. Avec son équipe, notamment son responsable des collections, d’origine allemande (signe de l’évolution des mentalités des deux peuples qui se sont opposés à quatre reprises entre 1815 et 1944), elle décide de mettre en œuvre une scénographie plus immersive, plus moderne et encore plus didactique.

Certes, la part belle est laissée au matériel militaire, aux uniformes, aux armes, aux véhicules,… mais le musée Guerre et Paix en Ardennes traite aussi des expériences de guerre dans leur entièreté en y incluant largement la place des civils. Cela, y compris dans les périodes d’entre-deux-guerres, qui ont finalement servi à la construction du discours guerrier à venir. C'est d'ailleurs un bon outil pédagogique (grâce aux différents supports produits sous la houlette de Nicolas Charles, enseignant et professeur-relais auprès du service éducatif du musée), notamment pour aborder les concepts de culture de guerre, de guerre totale, de guerre idéologique, de guerre d’anéantissement, etc. La scénographie chronologique permet aussi d’aborder l’histoire institutionnelle de la France et la succession des régimes impérial et républicain de la fin du XIXe siècle, puis la rupture entre Troisième République et État français du régime de Vichy, et enfin le retour à la République.

Si la guerre est centrale dans la scénographie muséale, la paix n’est jamais loin et est surtout l’élément conclusif de la scénographie, ce qui permet de réfléchir à la place de la paix dans le monde, en particulier  à la suite de la mise en œuvre de l’ONU et des procès de Nuremberg au lendemain du second conflit mondial. L’objet muséal lui-même peut aussi être analysé dans le cadre du concept du devoir de mémoire. 

Ce long reportage de plus de cinq minutes est diffusé le jeudi 15 mars 2018 dans le cadre – semble-t-il – d’une série de reportages visant à faire découvrir les sites patrimoniaux de la région aux téléspectateurs, mais aussi en raison de la récente réouverture du musée Guerre et Paix en Ardennes (janvier). Il s'inscrit également dans le contexte des différentes manifestations organisées dans les Ardennes (comme dans toute la France) pour le centenaire de la Grande Guerre, comme quelques semaines plus tôt, au début du mois de février, le colloque international organisé à Charleville-Mézières par Stéphane Tison et Nicolas Charles sur la reconstitution des Ardennes au lendemain du premier conflit mondial.

Le montage de ce reportage est assez caractéristique : il commence par une vue du musée en arrière-plan de la journaliste envoyée in situ qui présente son sujet ; il termine par la journaliste de nouveau seule faisant la conclusion du reportage. Entre-temps, c’est un parcours dans la scénographie du musée à travers les trois temps majeurs (les trois guerres) en compagnie tantôt de la conservatrice (Marie-France Devouge), tantôt du chargé des collections (Alfred Umhey), présentant la structure muséale et son discours pédagogique.

Avec ce reportage, la chaîne régionale est pleinement dans son rôle d’information régionale et de mise en avant du patrimoine local, participant de ce fait au devoir de mémoire autour des conflits régionaux et mondiaux.