Répétitions du spectacle de la compagnie L'Homme debout à Esch-Belval

Premiers pas réussis pour Piot au pied des hauts-fourneaux d’Esch-Belval : le projet participatif de la compagnie L’Homme Debout à Poitiers a séduit dans le Val d’Alzette. La déambulation est portée par plusieurs communes transfrontalières, le triangle d’or Esch-sur-Alzette – Audun-le-Tiche – Villerupt, qui correspond à l’histoire industrielle des mines de fer, de la sidérurgie, mais aussi des migrations qui ont alimenté cette épopée ouvrière aujourd’hui reléguée pour une grande part au rang de souvenir. Reste la mémoire, l’histoire pour servir de creuset à une identité commune. Le spectacle Piot, le roi des cheminées a été conçu spécifiquement pour être réalisé puis joué à saute-frontières dans le Val d’Alzette. Près de 800 personnes – dont une majorité d’élèves des écoles et collèges du secteur – ont été associés à la fabrication de ce géant en osier tressé avec du fil de fer. Le Piot – diminutif populaire de « petit » – est articulé par plusieurs assistants de la compagnie qui l’accompagnent dans sa déambulation. Haut de 7,50 mètres, elle en impose cette marionnette hors normes qui s’inscrit, en réalité, dans la une grande tradition. Celle des Géants du Nord, en Flandre, en Picardie depuis le XV^e siècle jusqu’à nos jours. Ils représentent symboliquement l’histoire des communes dont ils sont issus et défilent lors de parades annuelles particulièrement pittoresques, qui suscitent toujours une véritable liesse populaire.

La compagnie L’Homme Debout, appartient elle-même au courant artistique des festivals de rue qui s’est singulièrement développé depuis une vingtaine d’années dans l’Ouest de la France avec des protagonistes remarquablement créatifs comme les Royal de Luxe, La Machine Compagnie de François de La Rozière ou Remue-Ménage à Nantes.

Dans le sujet présenté lors du journal régional de France 3 Lorraine, Isabelle Chaigne, cheffe du projet culture de la communauté de communes du Pays Haut Val d’Alzette insiste avec justesse sur le caractère participatif du projet, tandis que Benoît Mousserion développe la méthode créative qui a abouti à l’écriture du récit à partir de collecte de fragments de mémoire auprès des habitants. Tous ont évoqué l’histoire de la sidérurgie, des mines de fer, des migrations. Leur histoire. C’est ainsi que s’est construite la déambulation de Piot, alias Angelo, à qui les grands-parents, d’origine italienne, ont légué le trésor de leurs ancêtres. L’horloge ponctuant le parcours dans le spectacle symbolise le temps qui a rythmé la vie à l’usine, la mine, et dont elle demeure l’unique vestige.

Pas tout à fait, puisque le Piot géant fabriqué avec les enfants a trouvé son point d’ancrage définitif au sein du pôle culturel de Micheville où il veille désormais sur le devenir d’un Val d’Alzette toujours en train de se réécrire. Le cadre des cités ouvrières du Pays Haut a également servi de support à Hervé Barulea, né en 1947 à Thil,  pour raconter en bandes dessinées – sous le nom d’auteur de Baru – son enfance, son adolescence dans le Pays Haut. Ses albums comme La piscine de Micheville (Futuropolis, 1985), la trilogie Quéquette Blues (Dargaud) primée au festival de BD d’Angoulême, La communion du minot et Vive la classe contribuent également à raconter la mémoire vive des enfants du pays, ces minots, ces piots qui n’entendent ni être les « ritals de service » ni être effacés de leur riche histoire commune.