La médecine prédictive peut lire l'avenir dans les gènes
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Résumé
Les progrès de la recherche permettent aujourd'hui d'anticiper nos futures maladies. En analysant le génome, il est désormais possible d'étudier la prédisposition génétique des personnes testées à certains types de maladies graves, comme des cancers. Des débats sont en cours pour rendre ces tests plus accessibles. Certains craignent cependant les dérives eugéniques de ce type de pratiques.
Date de diffusion :
17 avr. 2018
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Contexte historique
ParDocteur en Histoire contemporaine, Post-doctorant à Aix-Marseille Université
Publication : 2021
En 1953, deux chercheurs britanniques découvrent la structure de l’acide désoxyribonucléique (ADN) présente dans le noyau de presque toutes les cellules. L’ADN est divisée en chromosomes et contient l’information génétique, appelée génome, héritée de nos concepteurs biologiques. Une mutation, c’est-à-dire un défaut dans ce code de la vie, peut provoquer des maladies comme la mucoviscidose, alors que certains cancers résultent de mutations sur plusieurs gènes.
Lancé à la fin des années 1980 sous la forme d’un projet collaboratif à l’échelle internationale, le séquençage complet de l’ADN du génome humain est achevé en 2003. Des machines de plus en plus perfectionnées permettent dès lors de rapidement lire et interpréter certaines informations contenues dans les gènes d’une personne, afin de déterminer sa prédisposition biologique à certaines maladies. Les chercheurs ont notamment mis en évidences des biomarqueurs génétiques fréquemment associés à certaines pathologies. Les femmes porteuses de la mutation du gène BRCA1 ont par exemple entre 70 % et 90 % de risque de développer un cancer du sein ou des ovaires. De son côté, la start-up marseillaise de biotechnologie Genepred, créée en 2012 a levé dès 2016 d’importants fonds pour perfectionner des algorithmes pionniers destinés à prédire les risques de développer la cirrhose ou le cancer du foie.
Sans minorer l’importance croissante des facteurs comportementaux et environnementaux dans l’apparition des maladies, la médecine prédictive constitue une indéniable révolution, qui n’en est de surcroît qu’à ses débuts, car elle devrait très prochainement profiter des avancées rapides de l’intelligence artificielle. Elle est en France très encadrée et réservée aux personnes à risque, alors qu’aux États-Unis les tests génétiques sont en vente libre à un prix abordable, et rien n’empêche un Français d’en commander un sur internet dans le but de procéder à une analyse de son ADN. À l’instar du professeur Pascal Pujol du CHU de Montpellier, président de la Société française de médecine prédictive et personnalisée (SFMPP), des médecins sont favorables à une utilisation plus poussée, dans le cadre d’un accompagnement thérapeutique, de ces tests génétiques, notamment à destination des patients sans antécédents familiaux. L’objectif est de dépister par anticipation les risques de survenue d’une maladie grave, avec à la clé de bien meilleures chances de succès qu’avec le seul recours à une médecine curative après l’apparition des symptômes.
Certaines applications de la médecine prédictive posent toutefois d’évidents problèmes éthiques, qui sont discutés, en 2018, à l’occasion de la préparation de la révision des lois bioéthiques, dont la dernière actualisation date de 2011. Un recours plus étendu au diagnostic préconceptionnel (DPC) par les femmes non encore enceintes est certes une bonne manière de diagnostiquer certaines maladies génétiques auxquelles le nouveau né aurait une forte probabilité d’être exposé. Mais une sélection par les parents des enfants à naître, dans le but compréhensible de leur éviter infirmités et maladies graves, contient un risque de dérives eugénistes, au sens d’amélioration du patrimoine génétique de l’espèce humaine provoquées par la volonté d’avoir un « enfant parfait ». La question se pose aussi de savoir s’il faut tout connaître de soi au risque de vivre durant de longues années voire des décennies dans la peur du déclenchement d’une maladie.
La constitution de ces immenses bases de données, en lien avec la médecine prédictive et plus largement le développement de la e-santé, pose un autre problème éthique, non évoqué dans le reportage, celui de la collecte des données de santé par des entreprises étrangères privées et de leur utilisation à des fins mercantiles. Les lois bioéthiques ont toutefois pris la précaution d’interdire en France aux banques et compagnies d’assurance d’avoir accès aux données génétiques de leurs clients. Ces bases de données permettent aussi, par détournement, aux enfants ne connaissant pas leurs parents biologiques de tenter de rechercher le chaînon manquant de leurs origines, avec parfois à la clé des révélations heureuses ou plus bouleversantes pour l’ensemble des personnes concernées. Enfin le fichage génétique d’une large partie de la population porte en germe le danger d’un tri et d’une discrimination des individus, par un régime non démocratique, en fonction de leur appartenance à telle ou telle catégorie ethnique.
Bibliographie
- Alexis Normand, Prévenir plutôt que guérir. La révolution de la e-santé, Paris, Eyrolles, 2017.
- Pascal Pujol, Voulez-vous savoir ? Ce que nos gènes disent de notre santé, Paris, humenSciences, 2019.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Julian Bugier
Notre dossier maintenant :et si nous n’étions plus jamais malades.C’est la promesse de la médecine prédictive.Elle pourrait bouleverser, vous allez voir, notre rapport à la santé.Tests génétiques ou puces connectées, ces nouveaux outils permettraient de détecter une maladie des années avant qu’elle se déclare, cancer ou maladie d’Alzheimer.Mais cette nouvelle médecine, basée sur la génétique donc, est-elle sans danger, est-elle vraiment sans danger ?C’est un dossier signé Anthony Jolly avec Annie Tribouard et notre bureau à Marseille.
(Musique)
Anthony Jolly
De l’avis des scientifiques et des chercheurs, une révolution est en cours dans le monde médical :la médecine prédictive.Nous sommes aujourd’hui capables de connaître les risques de développer une maladie au cours de sa vie alors même que nous sommes en bonne santé.C’est possible grâce à un test génétique, une analyse de son ADN par une simple prise de sang.Plus de 500 000 Français y ont eu recours ces trois dernières années.Lire l’avenir dans nos gènes, comment est-ce possible, quelle utilité, y a-t-il des risques de dérive ?
(Musique)
Anthony Jolly
Ces tests génétiques ont sauvé la vie de cette mère de deux enfants.En 2014, Marion Vandromme développe un cancer du sein à 36 ans.
Marion Vandromme
J’ai voulu comprendre parce que c’est vrai qu’un cancer à 36 ans, un cancer du sein, ce n’est quand même pas courant.
Anthony Jolly
Après un test, elle découvre que le gène responsable vient de son père, mais surtout, elle apprend qu’elle risque aussi de développer un cancer des ovaires, très souvent mortel.
Marion Vandromme
J’ai choisi la solution radicale :je me suis fait enlever les seins et les ovaires pour avoir des chances de vivre, quoi !Voilà, tout simplement.Si je n’avais pas connu l’existence de ce gène, si je ne m’étais pas fait enlever les ovaires, j’aurais certainement eu un cancer des ovaires entre 40 et… voilà.Donc, oui, moi, ce test m’a sauvé la vie à mes yeux.
Anthony Jolly
Actuellement, les conditions sont très précises pour pouvoir faire un test génétique :il faut que trois membres de la famille aient été atteints du même cancer ou l’avoir développé jeune.Des conditions trop strictes selon ce professeur.Il voudrait que ce test soit prescrit à plus de femmes qui n’ont pas forcément d’antécédents familiaux car aujourd’hui, une femme sur 300 a une prédisposition génétique pour un cancer des ovaires.
Pascal Pujol
Une femme sur 300, en France, c’est 100 000 femmes, qui sont soumises à ce risque.Et ces 100 000 femmes chez qui on pourrait éviter un grand nombre de cancers de l’ovaire qu’on devrait ne plus voir.
Anthony Jolly
En matière de médecine prédictive, les progrès techniques sont spectaculaires.Dans ce laboratoire marseillais, il ne faut que quelques heures pour décoder un génome, impensable il y a quelques années.Pierre Dessein et son équipe de scientifiques ont lancé leur start-up en 2012.Ils ont mis au point un système unique capable de prédire les risques de cancer du foie.
Pierre Dessein
Ici, c’est d’une certaine manière de simplement le code génétique d’un patient, un ou plusieurs patients.Nous aujourd’hui, ce que nous avons, ce sont des algorithmes qui sont capables de lire ces codes génétiques et d’identifier dans l’ADN des patients des mutations génétiques qui prédisposent les patients à développer certaines maladies graves.
Anthony Jolly
Une fois les résultats analysés, l’entreprise donne au médecin le pourcentage de risque pour le patient de développer le cancer.Jusqu’où faut-il autoriser ces tests ?Qui doit y avoir accès ?Interdit en vente libre en France, ces tests font fureur sur Internet.Plusieurs sites étrangers proposent d’analyser son ADN en entier pour moins de 100 euros.Faut-il tout connaître de soi, voire anticiper la maladie de ses futurs enfants ?C’est ce que l’on appelle les tests préconceptionnels, réalisés avant de concevoir l’enfant.Prenons l’exemple de la mucoviscidose.Aujourd’hui, un couple découvre que son enfant est atteint de la maladie seulement au moment du diagnostic prénatal.La femme est déjà enceinte.Demain, en faisant un test avant la conception de l’enfant, les parents pourraient savoir s’ils ont le gène de la mucoviscidose.Si c’est le cas, ils auront un risque sur quatre de le transmettre à leur enfant, une information à laquelle les parents devraient avoir accès selon cette spécialiste en génétique.
Dominique Stoppa-Lyonnet
Il me semble que la place des diagnostics génétiques pré ou périconceptionnels, est un élément dont devrait, je dirais, s’emparer les travaux préparatoires à la révision de la loi bioéthique.
Anthony Jolly
Ce type de test pose question :n’y a-t-il pas un risque de dérive eugénique, un risque de rechercher l’enfant parfait ?
Intervenante
Je pense qu’il y a un risque de dire :on élimine, on élimine tout ce qui n’est pas normal, même si éventuellement on peut apporter une solution.Il est clair que le développement des techniques de diagnostic prénatal et du diagnostic génétique conduisent les parents à refuser la maladie chez leur enfant, à refuser le handicap, dans l’espoir d’avoir un enfant parfait.
Anthony Jolly
Aujourd’hui en France, entre 5 et 10 pourcent des cancers sont d’origine génétique.
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