Embarquement du CEFEO

05 juillet 1946
01m 20s
Réf. 01065

Notice

Résumé :

Un corps expéditionnaire est créé pour aller relever les troupes du général Leclerc stationnées en Extrême-Orient. Composé essentiellement de soldats coloniaux et de légionnaires, le corps embarque sur le Maréchal Joffre à Marseille, à destination de Saïgon. La vie à bord se déroule paisiblement, malgré les obsèques d'un légionnaire et la traditionnelle "fête à Neptune" pour le passage à l'Equateur.

Type de média :
Date de diffusion :
05 juillet 1946

Éclairage

Datant de juillet 1946, cet extrait des Actualités cinématographiques illustre la relève des troupes du général Leclerc en Extrême-Orient. Initialement envoyées en Indochine pour libérer le territoire de l'occupant nippon, le Corps Expéditionnaire se retrouve finalement engagé dans une guerre de décolonisation contre le Vietminh d'Ho Chi Minh. Ce document est tourné et projeté au moment où le conflit change de nature ; il s'inscrit alors dans le cadre d'une propagande officielle qui vise à « dédramatiser » le bourbier indochinois dans lequel est en train de s'enliser la France de l'immédiat après-guerre.

En premier lieu, le commentaire insiste sur l'envoi de troupes coloniales (tirailleurs sénégalais) et de légionnaires. Il s'agit ainsi de rassurer l'opinion publique sur l'identité des combattants : les Français n'auront pas à subir l'impact humain d'une nouvelle guerre, celle-ci se déroule non seulement à l'autre bout du monde, mais est menée en leur nom par des « étrangers ». A l'écran, quelques képis blancs sont identifiés alors qu'à l'inverse les troupes coloniales sont massifiées. Ainsi, dans la plus pure tradition des représentations collectives coloniales, l'Autre de couleur est-il toujours présenté comme une identité d'ensemble et non individuelle. S'ajoute à cette dévalorisation symbolique un choix de mise en scène appuyé : les tirailleurs sénégalais, amassés sur le pont, sont filmés en plongée (depuis une position en hauteur, ce qui donne une impression d'écrasement de la masse) et depuis un point de vue latéral. Maintenant que cette guerre est ouvertement un conflit de décolonisation, ce sont donc des troupes coloniales qui sont envoyées pour faire régner l'ordre impérial en Indochine ; les indigènes s'opposent ainsi entre eux selon un affrontement racial qui est supposé bénéficier à la République.

Outre ces effets de style sur la sélection des plans intégrés au montage des Actualités (qui en dit long sur les mentalités de l'époque et la vision de l'homme de couleur), on peut également relever le ton enjoué du commentaire et l'accompagnement musical choisi pour l'occasion : un air dynamique et conquérant qui vient contribuer à l'impression générale d'un départ léger et guilleret pour l'aventure.

Le sujet se poursuit d'ailleurs sur des plans totalement anodins de vie à bord, entre salon de coiffure improvisé et atelier tricot pour ces dames.

Tout est donc mis en œuvre dans cet exposé sommaire de la relève des troupes pour ne jamais éveiller l'inquiétude des Métropolitains au sujet de ce front indochinois.

Delphine Robic-Diaz

Transcription

(Musique)
Journaliste
Un corps expéditionnaire destiné à relever les troupes françaises stationnées en Extrême-Orient va s’embarquer à Marseille sur le Maréchal Joffre. Composé de régiments coloniaux, on les distingue côte à côte, le légionnaire et le tirailleur sénégalais.
(Musique)
Journaliste
L’heure du départ est proche, c’est l’instant pénible pour les fiancées.
(Musique)
Journaliste
Quand le dernier colis prend le chemin de la cale, on procède aux habituelles opérations de sécurité nécessaires. Tous les hommes reçoivent leur ceinture de sauvetage.
(Musique)
Journaliste
Le bateau a levé l’ancre et cingle vers le large.
(Musique)
Journaliste
La vie s’organise, douce et tranquille à bord. On dort, on lave son linge ou on fait sa toilette, on coud, et spectacle peu ordinaire chez les militaires, on tricote aussi.
(Musique)