Serge Basso de March, directeur de la Kulturfabrik

Serge Basso de March, nouveau directeur du centre culturel Kulturfabrik à Esch-sur-Alzette, est interviewé par la journaliste de RTL Télé Lëtzebuerg, Caroline Mart, peu après sa nomination en 2002. Le face-à-face se tient dans les locaux du Centre culturel. La journaliste souhaite savoir ce qui a motivé le responsable à accepter le « job », mais aussi les atouts de ce nouveau venu sur la scène culturelle luxembourgeoise. 

Cette nomination intervient après plusieurs années de crise au sein de la Kulturfabrik. En 2000, faute de moyens financiers suffisants, le centre culturel s’est retrouvé au bord du gouffre, provoquant la démission de la présidente et de la gestionnaire et amenant l’établissement à naviguer à vue pendant près de deux ans. Serge Basso de March accepte de relever le défi afin de redresser cet espace emblématique  de l’esprit de la scène culturelle eschoise, à l’architecture unique au Luxembourg .

L’histoire de la Kulturfabrik, dite « Kufa », remonte au début des années 1980. Un an après la fermeture des anciens abattoirs de la ville, le site est utilisé par Ed Marold pour y monter une première pièce de théâtre avec sa troupe du Lycée de Garçons d’Esch-sur-Alzette, la « Theater GmdH ». D’autres artistes vont « squatter » le lieu qui s’organise sous forme associative en 1983. C’est aussi le début de la galerie Terres Rouges et, un an plus tard, du cinéma d’art et essai le Kinosch. Dans les années 90, le café Ratelach accueille les groupes néo-punk tandis que les groupes de blues jouent dans la Grande salle. Ces différentes scènes structurent toujours les activités de la Kulturfabrik qui s’étend sur 4 500 mètres carrés.  

La Kufa devient officiellement un centre culturel en 1996. Elle est depuis lors soutenue par deux conventions, l’une de la commune d’Esch-sur-Alzette, l’autre du ministère de la Culture. L’esprit libertaire des débuts s’assagit mais reste ancré dans la mythologie de la Kufa. Serge Basso fait référence dans l’interview à son âme profonde. 

Lorsqu’il arrive aux commandes, l’infrastructure a fait l’objet d’une sérieuse rénovation pour se mettre aux normes. Néanmoins, ses frais de fonctionnement restent un gouffre qui laisse peu de marge de manœuvre pour la programmation.

Les défis à relever par le nouveau directeur sont immenses. A commencer par asseoir sa légitimité, puisque souligne la journaliste Caroline Mart : le public luxembourgeois ne vous connaît pas. Or au Luxembourg, les principales institutions ou associations culturelles sont traditionnellement pilotées par des Luxembourgeois. La première année européenne de la Culture, coordonnée par le Français Claude Frisoni en 1995, a néanmoins ouvert une brèche. Une autre Française, Marie-Claude Beaud, a été recrutée en 2000 pour préparer l’ouverture du futur Musée d’art moderne (Mudam). 

Serge Basso ne parle pas la langue du pays. L’interview se déroule en français sur une chaîne d’information dont la langue vernaculaire est le luxembourgeois. Il estime néanmoins que cette nomination constitue un retour aux sources.  Né à Verdun, à 70 kilomètres de Esch-sur-Alzette, Serge Basso a travaillé comme attaché culturel à Longuyon (trois ans) puis fut responsable du service culturel de la ville de Longwy (sept ans) avant de prendre la direction artistique du Centre dramatique national de Béthune près de Lille (cinq ans). Il dirigera la Kulturfabrik entre 2002 et 2020. 

Sous son impulsion, la Kufa va s’ancrer dans un territoire transfrontalier à travers différents projets dont elle est initiatrice ou partenaire : Festival poétique transfrontalier, Festival Clown in progress, Festival du film italien de Villerupt, Festival Urban Art…

En 2019, sa dernière année complète en tant que directeur, la Kulturfabrik a accueilli 43 833 visiteurs venus de toute la Grande Région. Sa programmation est éclectique : musique, littérature, spectacle vivant, résidences d’artistes, ateliers créatifs. Disposant désormais d’un budget annuel de 2,5 millions d’euros, son fonctionnement est assuré par une équipe constituée d’une trentaine de personnes, contre huit en 2002 !