Les effondrements de la rue d'Aubagne à Marseille : l'insalubrité des immeubles
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À Marseille, de nombreux immeubles insalubres émaillent le quartier populaire de Noailles. Selon la mairie, celui du 63 rue d'Aubagne était muré car frappé par un arrêté de péril. Au 65, neuf des douze appartements étaient occupés car l'arrêté de péril avait été levé par un expert judiciaire. Les habitants comme les riverains ont pourtant procédé à de nombreux signalements, qui n'ont pas donné suite.
Date de diffusion :
05 nov. 2018
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Contexte historique
ParDocteur en Histoire contemporaine, Post-doctorant à Aix-Marseille Université
Le lundi 5 novembre 2018 à 9h09, deux immeubles situés aux 63 et 65 rue d’Aubagne dans le quartier de Noailles, en plein centre de Marseille, s’effondrent, le premier ayant entraîné le second dans sa chute. Une course contre la montre s’engage alors pour les marins-pompiers et les sauveteurs, afin de retrouver, au péril de leur vie, des personnes ensevelies sous les gravats. Un troisième immeuble, au 67 de la même rue, est d’ailleurs abattu dans la journée pour sécuriser les opérations de déblaiement. Aucune victime n’est à déplorer au n°63 qui était alors muré et squatté. En revanche l’immeuble mitoyen, malgré son insalubrité manifeste, était encore habité au moment du drame par douze personnes (9 appartements). Sous les décombres sont finalement retrouvés huit corps, laissons le quotidien Le Monde redonner une part d’humanité à ces victimes : « Au 1er étage vivait Ouloume, Comorienne débarquée à Marseille il y a cinq ans avec son fils El Amine, neuf ans, inscrit à l’école publique Chabanon, un peu plus haut. Au 2e, ce jour funeste, Rachid Touloum avait invité Taher, un Tunisien de 58 ans, et Chérif, 36 ans, né comme lui en Algérie, à passer la nuit. En face Julien, franco-péruvien, réceptionniste dans un hôtel du Vieux-Port. Un étage plus haut Simona Carpignano, 30 ans, dreadlocks et sourire magnifique, avait quitté Tarente, dans les Pouilles pour passer son master 2 d’économie sociale et solidaire à Aix-Marseille Université (…) La veille du 5 novembre, son ami Niassé, un Sénégalais de 26 ans, était resté passer la nuit. Sur le même pallier habitait Fausto, de son vrai prénom Fabien, artiste peintre bohème et noctambule (…) Au 5e étage, enfin, vivait Marie-Emmanuelle, une quinquagénaire, l’une des rares dont le corps sera enterré en France. ». Cette évocation témoigne du fait que la rue d’Aubagne est, à l’instar d’autres artères marseillaises, celle des derniers arrivés ou des personnes de passage recherchant un logement bon marché en centre-ville.
La Mairie attribue avec légèreté l’effondrement à la fragilisation des immeubles à la suite de fortes pluies les jours précédents, avant de se rétracter. Sa responsabilité apparaît en effet rapidement écrasante par ses faibles réalisations en termes de lutte contre l’habitat indigne, qui, selon un rapport remis à la ministre du Logement en 2015, concerne 40 000 logements dans la ville et 100 000 habitants. À Noailles, cette vétusté affecte, à des degrés divers, près d’un immeuble sur deux, et, comme l’illustrent les micro-trottoirs de la vidéo, les habitants ont utilisé divers moyens pour dénoncer l’insalubrité, notamment en publiant sur les réseaux sociaux les traces des dégradations successives. Le mauvais entretien du parc immobilier municipal contribue largement à cet état de fait. Le numéro 63 appartient d’ailleurs à la ville, via Marseille Habitat, et la réprobation atteint son paroxysme lorsque la presse révèle que des élus de la majorité municipale sont des bailleurs de taudis dans le centre de Marseille. Dans une ville où le clientélisme électoral est installé depuis de nombreuses décennies, le fait que ce quartier populaire ne vote pas du bon côté de l’échiquier politique contribue à accroître son délaissement. Le député le représentant à l’Assemblée nationale depuis 2017 est d’ailleurs Jean-Luc Mélenchon leader de la France insoumise.
La gentrification du centre-ville de Marseille accuse assurément du retard en comparaison de celle d’autres métropoles françaises, et à quelques encablures du Vieux-Port et de ses touristes ou du renommé lycée Thiers subsistent de très importantes poches de pauvreté s’accompagnant de mal-logement. Parallèlement à la rénovation de la façade maritime, une tentative d’éviction des classes populaires du centre de Marseille est toutefois insidieusement à l’œuvre et dénoncée comme telle par les associations, même si les autorités se trouvent confrontées à la difficulté de créer des emplois assez attractifs pour attirer des classes plus aisées. Une partie du quartier de Belsunce, que seule la Canebière sépare de Noailles, a ainsi été en partie transformé, avec comme symboles l’arrivée du tramway ou l’implantation à l’intérieur de l’Alcazar de la bibliothèque municipale. A Noailles, la vitalité commerciale de ce « ventre de Marseille » ralentit indéniablement le processus, mais à la suite de cette tragédie la « chasse aux pauvres » prend la forme de l’évacuation de nombreux logements par les services municipaux, en vertu d’une application désormais rigoureuse du principe de précaution. Une crise du logement se transforme donc en crise humanitaire. Des collectifs de citoyens, dont celui du 5 novembre, se forment alors pour prêter assistance matérielle et psychologique aux sinistrés ou déplacés, tout en dénonçant « la non assistance à ville en danger ».
Bibliographie
Michel Peraldi et Michel Samson, Marseille en résistances. Fin de règnes et luttes urbaines, Paris, La Découverte, 2020.
Transcription
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