Bilan et perspective des entreprises japonaises implantées en Alsace
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Tour d’horizon des mutations économiques récentes des entreprises japonaises établies en Alsace. Auprès de ces investisseurs nippons, les acteurs locaux œuvrent à la promotion des atouts de la région.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
18 juin 2018
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Les liens économiques entre l’Alsace et le Japon sont anciens et fluctuent au gré du contexte politique et économique. Leur étude dans la durée permet de saisir, à une échelle réduite, les logiques à l’œuvre dans la recomposition et les dynamiques des espaces productifs, et de percevoir les liens unissant lieux, acteurs et processus qui concourent à la production de biens et de services.
Les premières relations remontent à 1863, moment où le Japon s’ouvre à la modernité et multiplie ses contacts avec l’Occident. Des commerçants d’Osaka passent commande de tissus à la manufacture Mieg, leader du textile en Europe, et réalisent des transferts de technologie profitables à leur industrie nationale naissante. Les liens se distendent au cours du siècle suivant, en raison de l’impérialisme japonais et de la stratégie de développement adoptée par le pays durant les Trente Glorieuses. Leur revitalisation s’opère à la fin du XXe siècle.
Les grandes firmes nipponnes engagent une politique de délocalisation de leurs sites productifs pour se rapprocher des marchés de consommation. Une vingtaine d’entre elles choisissent l’Alsace. Il s’agit surtout de sites d’assemblage de produits électroniques grand public aux dimensions variables (de 4 ou 5 salariés pour les plus petits à plus de 1 500 pour les plus grands) : Sony s’installe à Ribeauvillé, Ricoh à Wettolsheim, Sharp à Soultz, etc. Les ouvertures se poursuivent jusqu’au début des années 2000, période où les entreprises à capitaux japonais comptent plus de 4 000 salariés, soit 6 % des emplois industriels alsaciens. Dans un contexte de désindustrialisation, ce mouvement d’implantation, à rebours de la tendance générale, est une véritable aubaine dont les acteurs publics se saisissent afin d’inscrire cette tendance dans la durée.
En 1982, le CAHR (Comité d’Action du Haut-Rhin) ouvre une délégation à Tokyo. La politique de marketing territorial s’avère payante. Le département devient une terre d’accueil des IDE (investissements directs à l’étranger) des industries japonaises. L'agence de développement de l'Alsace (ADA) - devenue l’AAA (Agence d’Attractivité de l’Alsace) - s’emploie également à créer diverses structures dédiées au Japon. Parmi les plus emblématiques, on peut citer le département de japonais à l’Université de Strasbourg, la maison universitaire France-Japon, ou encore le lycée Seijo à Kintzheim qui accueille les enfants du personnel japonais installé dans la région.
Les résultats de cette politique volontariste se traduisent par l’ouverture d’un consulat japonais à Strasbourg en 1992. Les acteurs publics nationaux accompagnent cette dynamique. L’État attire les investisseurs japonais par des incitations fiscales et des subventions dédiées à la création d’emplois. Cet exemple montre que les logiques d’implantation des unités productives ne sont pas strictement entrepreneuriales. Elles sont aussi le résultat du jeu des différents acteurs publics œuvrant à l’attractivité de leur territoire, contribuant ainsi à recomposer les activités productives par le biais d’une politique de zonage destinée à revivifier ou maintenir l’emploi dans les espaces touchés par la crise.
Depuis 2014, l’AAA délègue le développement des relations entre l’Alsace et le Japon au CEEJA (Centre Européen d’Études Japonaises d’Alsace), association créée en 2001 qui a pour vocation de défendre la culture et l’économie nippones en terre alsacienne. Pour faciliter les liens entre acteurs économiques japonais et régionaux, le CEEJA a ouvert en 2015 un hôtel d’entreprises à Kintzheim afin d’héberger et guider les partenaires nippons dans leurs premières démarches de prospection.
Le choix des firmes nippones montre que le coût de la main d’œuvre n’est pas l’élément déterminant dans la logique d’implantation des entreprises mondialisées. Il est aussi guidé par la culture commune des deux territoires. Les chefs d’entreprises japonais sont sensibles aux valeurs humanistes de la région rhénane ainsi qu’à la réputation de sérieux et de docilité de la main d’œuvre alsacienne.
Depuis la fin de cet « âge d’or », les relations entre l’Alsace et le Japon sont entrées dans une nouvelle ère liée aux mutations du contexte économique. La plupart des sites d’assemblage ont fermé ou réorienté leur production. Pourtant, une vingtaine d’entreprises sont toujours présentes. Il s’agit surtout de firmes innovantes dans le secteur des nouvelles technologies. Elles déploient certaines branches de leurs activités de services avec l’objectif de conquérir de nouvelles parts de marché. Dans une économie de plus en plus tertiarisée et numérisée, l’enjeu pour les acteurs publics alsaciens est de continuer à capter une partie des IDE japonais. Pour y parvenir, ils doivent s’efforcer de créer un environnement compétitif, et en particulier veiller à maintenir les conditions de formation d’une main d’œuvre qualifiée maîtrisant les compétences adaptées au nouveau contexte économique.
Éclairage média
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Le reportage du journal télévisé de France 3 Alsace diffusé le 18 juin 2018 s’inscrit dans le contexte de mutation des liens économiques entre l’Alsace et le Japon. Les grandes unités d’assemblage de firmes nippones tels que Ricoh ou Sony, qui ont participé au maintien des emplois industriels à un niveau élevé en Alsace pendant plusieurs décennies, réorientent désormais leur processus de production.
Quelques images d’archives de chaînes de montage de magnétoscopes, téléphones ou photocopieurs datant des années 1980 rappellent de façon concrète le type de produits qui était assemblé sur le territoire alsacien avant d’être distribué dans toute l’Europe. Les plans sociaux qui sont la conséquence des transformations de ce processus productif sont évoqués par des images de salariés manifestant devant leur usine sous la bannière de syndicats. Le commentaire rappelle cependant que les conflits entre les directions japonaises et leurs salariés alsaciens n’ont pas connu la même intensité et brutalité que peuvent parfois prendre les plans sociaux. L’arrêt de la fabrication de certains produits n’est pas systématiquement synonyme de la fermeture stricto sensu des sites productifs. Cela peut être l’occasion d’investissements dont la finalité est la modernisation (robotisation) des chaînes de productions, permettant le maintien d’un nombre plus limité d’emplois. Par ailleurs, certains sites ont été repris par des sous-traitants qui se sont engagés à réemployer une partie de la main d’œuvre.
Un contre-exemple permet même d’illustrer la diversité des situations. Certains groupes japonais continuent d’investir dans des sites industriels de montage : c’est le cas de Mitsubishi Heavy Industry, qui a repris l’usine de fabrication de moteur du groupe finlandais Wartsila à Mulhouse. L’interview du directeur industriel de l’usine de Mulhouse apporte des précisions sur les investissements conséquents réalisés par le groupe.
Le commentaire du journaliste rappelle les éléments clefs qui constituent toujours des atouts pour l’Alsace : la culture d’entreprise commune avec le Japon, sa situation stratégique au cœur de l’espace européen le plus riche et l’investissement actif des acteurs locaux pour séduire de nouveaux partenaires économiques. Le reportage donne la parole à plusieurs d’entre eux. Olivier Becht, actuel député du Haut-Rhin et président du CEEJA, fait le point sur l’attrait de l’Alsace pour les chefs d’entreprises japonais. Le témoignage de la directrice de l’agence Alsace-Japon permet de mesurer les efforts entrepris pour attirer les entreprises innovantes.
Si elles parviennent à s’ancrer dans un environnement très concurrentiel, ces PME sont sources d’emplois à venir et de la création d’une forte valeur ajoutée au bénéfice de l’ensemble de la région. Les quelques vues du récent hôtel d’entreprises établi à Kintzheim offrent un exemple concret des infrastructures mises à disposition des nouveaux partenaires économiques japonais désireux de s’implanter en Alsace.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Caroline Moreau
Ces suppressions d’emploi chez Ricoh rappellent la fermeture d’autres sites d’entreprises japonaises dans la région Mitsui ou encore le retrait de Sony.Pour autant, cela ne signifie pas la fin de la lune de miel entre l’Alsace et le Japon, il reste un partenaire économique qui continue d’investir dans la région, c’est un dossier signé Stéphane Gaudry et Bernard Steimer.
(Musique)
Stéphane Gaudry
C’était le milieu des années 80, Sony, Ricoh, Mitsui, THK, les plus grands groupes japonais s’implantent en Alsace les uns après les autres, et créent plus de 5 000 emplois, magnétoscopes, téléphones, photocopieurs, depuis l’Alsace, le Japon inonde l’Europe de ses produits high-tech, un partenariat fondé sur une même culture d’entreprise.
Olivier Becht
Le Japon a une culture d’entreprise particulière qui n’est pas une culture purement financière, qui est une culture humaniste très proche de cet humanisme rhénan, de ce capitalisme rhénan que nous avons.
Stéphane Gaudry
Mais depuis 15 ans, les emplois se sont effrités, ils ne seraient plus que 3 500. Des plans sociaux, vécus par les salariés comme des coups de canif au contrat moral qui les lie au Japon même si souvent, ils s’accompagnent d’investissements comme chez RICOH qui injectera 20 millions dans son usine de Wettolsheim, en parallèle de la suppression de 250 emplois.
Olivier Becht
Par exemple, lorsque Sony a quitté le territoire à l’époque, ça s’est fait sans drame, ils ont cédé l’usine à un sous-traitant qui a continué une partie de la production, et aujourd’hui, ils sont encore en lien avec Sony.Sony n’a jamais claqué la porte comme une entreprise américaine aurait pu le faire du jour au lendemain.
Stéphane Gaudry
Et ça fait moins de bruit que les suppressions d’emplois mais les entreprises japonaises continuent d’investir en Alsace.Mitsubishi qui a racheté en 2005 l’usine de fabrication de moteurs de Wärtsilä est en train d’augmenter sa surface et de rapatrier à Mulhouse son centre logistique néerlandais.
Hervé Muller
Il y a beaucoup d’investissements puisque nos machines principales avaient 20-25 ans, on les a rétrofitées ces deux dernières années.On continue à investir également au niveau d’usinage dans de nouveaux centres d’usinage.On s’est agrandi également pour développer notre fabrication de groupe sur site.Donc, oui, ça se traduit par des investissements.
Stéphane Gaudry
Une culture entrepreneuriale commune, un emplacement géographique stratégique, l’Alsace séduit encore au pays du soleil levant.Mais à l’image de l’économie japonaise, ce sont désormais des PME innovantes et des startups qui installent ici leurs têtes de pont vers l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient.De toutes petites structures qu’il faut fortement soutenir, ce que fait le CEEJA dans son hôtel d’entreprises.
Virginie Fermaud
Les managers qui arrivent ici sont totalement pris en charge, on s’occupe de leur installation entreprise, on s’occupe de trouver leur hébergement, de leur titre de séjour, de les mettre en contact avec des cabinets comptables, des avocats, on leur traduit les premières conversations le temps qu’ils embauchent une assistante ou un assistant qui parle japonais.
Stéphane Gaudry
Bien sûr, ce ne sont pas ces startups qui créeront des milliers d’emplois mais elles sont porteuses de technologie d’avenir et de fortes valeurs ajoutées.
Olivier Becht
En s’implantant dans notre région, et bien, ces entreprises donnent l’image d’une région attractive comme à l’époque, les grands groupes japonais l’avaient donné lorsqu’ils avaient choisi l’Alsace pour leur implantation.Ça crée de l’innovation sur le territoire, ça va créer de la valeur ajoutée pour le territoire et donc de la richesse qui est produite en Alsace.
Stéphane Gaudry
Innovation et engagement à long terme.Deux principes qui ont fait le succès de l’économie japonaise en Alsace dans les années 90 et qui restent d’actualité aujourd’hui.
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