Les conséquences du réchauffement climatique dans les Vosges

Ce reportage présente la situation des stations de ski vosgiennes, en perte d’activité depuis plusieurs décennies, dont les difficultés sont accentuées par le changement climatique, et souligne le déficit de durabilité de leurs modèles économiques. Il témoigne de la délicate articulation entre exploitation des ressources, enjeux économiques et préservation des espaces, dans un contexte de fragilisation des environnements lié à la transition climatique.

D’après une étude de Météo-France, la moyenne montagne, dont font partie les Vosges, perd en moyenne cinq jours de neige tous les dix ans depuis les années 60. La limite pluie-neige s’élève petit à petit : elle est passée, en soixante ans, de 1 200 mètres à 1 500 mètres d'altitude. Ces conséquences du réchauffement climatique impactent très fortement l’activité des stations de ski : chaque année, environ trois sites de moyenne montagne ferment en France. Selon Pierre-Alexandre Métral, doctorant en géographie alpine à l'Université de Grenoble, 45% des fermetures de stations de ski françaises ont été causées par le manque d'enneigement. Les autres raisons sont la concurrence économique entre les stations, la mauvaise gestion financière ou les changements de pratiques sociétales. En effet, le ski, après avoir traversé un  âge d’or en France dans les années 90, dans le sillage des Jeux Olympiques d’Albertville en 1992, connaît à l’heure actuelle un engouement moindre, notamment chez les jeunes. L'Observatoire des domaines skiables de France observe par ailleurs une stagnation de la fréquentation des stations françaises depuis 2008.

Les stations vosgiennes, espaces productifs de tourisme, sont évidemment concernées par ces fermetures : historiquement, quarante stations ont été créées dans le massif et quinze ont définitivement fermé, la dernière en date est la station de ski des Hautes-Navières au Valtin, le 31 décembre 2019. Leurs équipements, souvent laissés en friche, engendrent d’ailleurs des problèmes économiques et environnementaux. Pour faire face à cette situation, un certain nombre de stations vosgiennes misent sur l’enneigement artificiel ; mais celui-ci nécessite des investissements importants, et surtout des températures suffisamment basses et des ressources en eau suffisantes.

Les stations de ski ont par ailleurs l’obligation de développer une saisonnalité différente en diversifiant les activités, comme la randonnée, ou la luge toutes saisons. L’écotourisme ou tourisme vert est par ailleurs en progression dans la zone, en témoigne la croissance du parc de l’hébergement rural (gîtes ruraux, chambres d’hôtes, centres de vacances, résidences secondaires). En 2018, la Cour des comptes a préconisé aux stations en dessous de 1 800 mètres d'altitude de se diversifier pour développer un tourisme annuel et rester viable. L’institution estime en effet que, pour être rentable, une station de ski doit être ouverte au minimum 100 jours dans la saison. A cet égard, le manque d’enneigement oblige les domaines de basse et moyenne montagne à changer leur modèle économique : dans ces territoires, dont une grande partie des habitants dépend directement ou indirectement des retombées économiques du ski, il est capital de trouver d’autres sources de revenus potentiels en l’absence d’enneigement durant la saison hivernale. Ainsi, Le Lac blanc a investi en 2019 dans la luge sur rail, à l'instar de la station du Markstein, à hauteur de 3.5 millions d'euros. Cependant pour l’instant, malgré ces tentatives de diversification, le modèle économique dominant reste fondé sur le ski de piste.

Par ailleurs, derrière cette problématique liée à la météo, on peut entrevoir celle de la recherche d’un modèle plus écologique, car les canons à neige sont gourmands en énergie et en eau. De surcroît, le déficit d’enneigement décide certaines stations à importer de la neige par camion. Cela provoque l’ire d’associations écologiques qui dénoncent une « fuite en avant », alors que les stations expliquent ces opérations par la nécessité de préserver l’activité locale. En février 2020, le ministère de la Transition écologique et solidaire a lancé un plan d’accompagnement pour aider les stations à adopter des initiatives liées au développement durable et à accélérer leur diversification. En effet, il s'agit pour ces stations de concilier impératifs économiques, nouvelle donne environnementale et changements sociétaux et de consommation des utilisateurs, afin de proposer un modèle de tourisme durable.

Cet extrait du journal de France 3 Alsace aborde le sujet de l’activité des stations de ski vosgiennes. Le journaliste en plateau, qui semble faire la transition avec la météo, annonce un reportage sur la situation des stations de ski du massif vosgien, privées de neige en ce mois de janvier 2018, à cause d’un temps particulièrement doux.

Le reportage, qui démarre sur un plan des crêtes nues et de paysages bien peu enneigés en ce mois de janvier, fait immédiatement le lien avec le changement climatique lié à l’augmentation des gaz à effet de serre. La météorologue Sophie Roy présente un scénario très pessimiste sur la présence de la neige à l’horizon 2080. Ses explications font écho à une étude de Météo-France datant de 2018 qui prévoit qu’en 2080, le tourisme de ski ne serait envisageable qu’au-dessus de 2400 mètres.

Puis le reportage nous informe que les collectivités locales ont investi plusieurs millions d’euros dans l’activité hivernale d’un certain nombre de stations de ski du département du Haut-Rhin et que les quatre sites évoqués dans le reportage sont des « stations d’intérêt départemental ». La formule n’est pas expliquée dans le reportage : il s’agit d’un statut adopté en 2002 dans le cadre d’un plan de redynamisation, qui a conduit les communes à transférer leurs compétences en matière d’aménagement des stations à un syndicat mixte, composé des communautés de communes et du département du Haut-Rhin. Les enjeux économiques sont en effet considérables à l’échelle régionale et locale, en matière d’emplois, d’activité économique et d’attractivité touristique.

Les quatre sites cités dans le reportage sont ceux du Lac Blanc, du Schnepfrenried, du Markstein et du Ballon d'Alsace. Ce programme de relance, alors que se faisait sentir au tournant des années 2000 une certaine déprise économique dans le massif, s’est concentré sur ces quatre sites qui reçoivent les investissements les plus importants (nouveaux téléskis, canons à neige...) afin de permettre de maintenir l’activité hivernale. Cette stratégie des collectivités locales est appuyée par l’interview d’un membre du conseil départemental, qui explique que l’investissement se concentre notamment sur la production de neige artificielle Ce choix montre que le département mise avant tout sur une fréquentation hivernale pour la pratique du ski, cette stratégie semble occulter la nécessité d’une diversification des activités à toutes les saisons qui tiendrait compte de la baisse de l’enneigement.

Le reportage se poursuit sur l’interview du directeur d’exploitation de la station du Lac Blanc qui se veut positif, en considérant que les investissements engagés permettent le maintien de l’exploitation, voire améliorent même les conditions d’activité. Son propos reste allusif, il ne propose pas de chiffres (hausse de la fréquentation, des recettes…) pour l’illustrer.

Par ailleurs, les stations de ski vosgiennes ne connaîtront pas forcément toutes le même destin : l'enneigement étant un phénomène très variable suivant l'exposition et la pente, il est possible que l’activité puisse être maintenue en certains endroits malgré un contexte climatique global défavorable, sous forme de « couloirs de neige » sur les versants en ubac notamment.

Les journalistes concluent ce reportage en évoquant brièvement la nécessité d’une diversification des activités dans un territoire où des milliers d’emploi dépendent de la pratique du ski, diversification qui consisterait par exemple en une offre « quatre saisons ».

Ce reportage axe donc son propos sur les efforts en matière d’investissements pour un secteur-clé du massif vosgien, et laisse en suspens la question d’éventuelles stratégies de reconversion ou de diversification des activités dans les décennies à venir. La question d’un tourisme durable n’est par ailleurs pas évoquée, alors même que l’impact environnemental et paysager de l’utilisation massive des canons à neige pose à l’heure actuelle de multiples questions.