Election présidentielle : les candidats et le concordat
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Dans le cadre de l’élection présidentielle de 2012, France 3 rappelle un débat portant sur l’existence d’une spécificité en Alsace-Moselle, le Concordat, que certains candidats aimeraient voir supprimer. Ce débat fait suite à une proposition de François Hollande d’inscrire la loi de séparation des Églises et de l’État dans la Constitution.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
18 avr. 2012
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Le 18 avril 2012, France 3 Alsace diffuse un reportage sur le concordat dans un contexte particulier : le 22 avril a lieu le premier tour de l’élection présidentielle. Le concordat n’est appliqué qu’en Alsace-Moselle. Qu’est-ce que le concordat, pourquoi cette spécificité et quels sont les réels enjeux de ce débat ?
La spécificité du religieux dans la polémique révèle que le cœur du débat à l’échelle nationale se situe autour de la notion de laïcité. François Hollande émet dans un discours de janvier 2012 son souhait de voir la loi de séparation des Eglises et de l’État de 1905 inscrite dans la constitution. Cela mettrait fin au Concordat en Alsace-Moselle.
Cette loi implique que l’État ne salarie plus les ministres du culte, comme les prêtres, et ne finance plus les biens religieux. Cette forme de laïcité est très débattue, que ce soit par les partisans d’une religion d’État comme par les anticléricaux. Elle constitue donc une nouvelle étape dans la sécularisation, c’est-à-dire le transfert à l’État de valeurs, de compétences et de biens religieux.
Cependant, puisque l’Alsace et la Moselle sont annexées à l’Empire allemand suite à la guerre de 1870, la loi de 1905 n’est pas appliquée dans ces territoires, que ce soit au moment de son vote ou après la Première Guerre mondiale. Sur ces territoires est donc encore en partie appliqué le Concordat. Ce contrat, passé entre le pape et l’État, est celui de 1801. Napoléon Bonaparte établit par là une Eglise gallicane, c’est à dire une Eglise contrôlée en partie par l’État puisque ce dernier salarie et contrôle certaines nominations ainsi que les biens du clergé. Complété ultérieurement, ce système concerne les cultes catholiques, protestants et juifs. Il n’y a en revanche pas d'instauration d'une religion d’État. La sécularisation est donc localisée et d’intensité variable à l’échelle de la France.
Le candidat socialiste essaie de reprendre à son compte ce thème, celui de la laïcité, qui est depuis les années 1980 davantage exploité par les partis de droite et d’extrême droite. Le débat sur la laïcité se situe pour une part importante autour de la place de l’islam et de l’immigration, souvent associés dans certains discours politiques. La laïcité a pourtant été pendant longtemps une notion portée par des partis de gauche. Des années 1950 aux années 1980, les débats ont notamment concerné la place à donner à l’enseignement privé confessionnel. En plus de l’évolution du sens donné à la notion de laïcité, ce basculement nous montre que la religion demeure un enjeu politique majeur.
La proposition de François Hollande s’inscrit totalement dans ce contexte de volonté de réappropriation, par le PS, d’une réflexion autour de la laïcité. Inscrire une définition de cette notion dans la constitution peut pourtant d’une certaine manière la figer, alors qu’elle a été/est constamment débattue et déjà présente en tant que principe, dans la Constitution, le texte fondamental de la Ve République. Par ailleurs, modifier le texte nécessiterait un projet de révision, à faire accepter par référendum ou par le Parlement réuni en congrès à la majorité des 3/5 après vote par l’Assemblée nationale et le Sénat. Ce projet n’est finalement pas déposé, du fait notamment de désaccords à son sujet, d’une fragilité de la majorité parlementaire et d’un risque important de rejet par la voie référendaire. Écrite en 1958, la Constitution est ratifiée par référendum, et modifiée pour la dernière fois en 2008 (réforme de certaines institutions et création notamment du défenseur des droits) par la voie parlementaire.
Éclairage média
Par
Les candidats ont des positions différentes dépendant de la culture politique de leur parti et de la situation du débat sur la laïcité en 2012. Les partis « d’extrême gauche » (NPA avec Philippe Poutou, Lutte Ouvrière avec Nathalie Arthaud et Front de gauche avec Jean-Luc Mélenchon) défendent historiquement l’idée d’une séparation stricte entre Etat et cultes, et d’une égalité entre ces derniers. Ils sont donc favorables à une suppression du Concordat.
Eva Joly est une candidate écologiste, considérée à « gauche » et François Bayrou est un candidat du MoDem, parti du « centre ». Les questions liées au religieux ou à l’immigration ne sont pas au cœur de leur programme. François Bayrou essaie donc d’élargir le débat en rappelant que le Concordat n’est que le volet religieux d’un droit local plus vaste qui concerne également le droit foncier, associatif ou social. C’est également à cela que renvoie Jean-Luc Mélenchon. A « droite » et à « l’extrême droite » (UMP avec Nicolas Sarkozy, Debout la France avec Nicolas Dupont-Aignan et FN avec Marine Le Pen), la séparation entre l’État et l’Église catholique est historiquement combattue.
Lorsque l’UMP parle des « vieilles querelles », peut-être est-ce les manifestations en faveur de l’enseignement privé et contre la loi Savary en 1984 qui sont évoquées. Les questions sécuritaires, migratoires et religieuses constituent de manière croissante des thèmes centraux et imbriqués. Le positionnement concernant le Concordat est donc de s’opposer à l’intégration de l’islam, ce contrat étant présenté comme un héritage historique. On peut rappeler que ces particularités sont pourtant débattues dès l’après Première Guerre mondiale et que ce droit est encore en évolution, par la suppression par exemple du délit de blasphème en 2017.
Le reportage est diffusé le 18 avril 2012 par France 3 Alsace, quelques jours avant le premier tour de l’élection présidentielle. Cela explique en grande partie sa forme.
En effet, une règle de l’équité médiatique s’impose aux médias. Quinze jours avant le premier tour, puis entre les deux tours, le temps de parole accordé aux différents candidats doit être équivalent. Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA, créé en 1989) décompte ces temps de parole. Le reportage est donc une succession de séquences durant lesquelles l’on peut entendre chaque candidat donner son avis ou un journaliste les énoncer. Cette règle doit éviter une bipolarisation du débat politique, c'est-à-dire de résumer l’élection à une opposition entre deux candidats. Certains médias tentent de contourner ce principe en accordant moins de temps de parole à ceux qu’ils nomment les « petits » candidats aux horaires de forte audience.
La manière de « monter » ce reportage révèle les limites de cette règle. Les deux premiers candidats dont l’avis est présenté sont François Hollande et Nicolas Sarkozy. L’impression d’énumération que laisse le reportage donne alors un poids prépondérant aux deux premières formations citées, le PS et l’UMP, dont les candidats sont donnés favoris de l’élection.
On peut également relever certaines différences dans la manière dont les avis sont exposés. Pour certains candidats, les journalistes ont fait le choix d’intégrer des passages d’interviews ou de discours de candidats. Pour d’autres, le journaliste ne fait qu’énoncer leur position. Cela renvoie à une forme « de hiérarchisation » des candidats : les « principaux » ont droit au premier traitement (François Hollande, Nicolas Sarkozy, François Bayrou, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon) et les « petits » au second (Nicolas Dupont-Aignan, Eva Joly, Jacques Cheminade, Philippe Poutou, Nathalie Arthaud), une manière aussi de donner aux premiers un temps de parole plus important qu’aux seconds. Par ailleurs, si les noms des candidats et des partis sont systématiquement cités, l’expression « à la gauche du PS », utilisée deux fois pour désigner NPA, Front de gauche et Lutte Ouvrière, peut être considérée comme réductrice pour ces partis et donne à nouveau une place prépondérante au PS dans le traitement médiatique.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Sylvie Malal
La balle est désormais dans le camp des électeurs.C’est dimanche, le premier tour de la Présidentielle, durant la campagne, le Concordat n’aurait probablement pas été un sujet de débat sans la proposition de François Hollande, il veut inscrire la loi dans la Constitution.Dans la foulée, presque tous les candidats se sont prononcés pour son maintien, sauf à la gauche du PS où cet héritage napoléonien est jugé anachronique.On revoit tout cela avec David Meneu.
David Meneu
22 janvier au Bourget à Paris, François Hollande énonce ses propositions de campagne dont celle d’inscrire la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution.Le Concordat d’Alsace-Moselle semble menacé, rectification du candidat socialiste quatre jours plus tard.
François Hollande
Nous introduirons dans la Constitution la séparation des églises et de l’Etat, sauf bien sûr, pour l’Alsace et la Moselle qui ont des traditions et qui ont aussi un régime particulier.
David Meneu
Nicolas Sarkozy et l’UMP se sont rapidement emparés de l’annonce du Bourget pour brandir le risque d’un retour aux vieilles querelles religieuses.Philippe Richert, ministre des collectivités affirmant même lors du meeting du candidat UMP à Strasbourg, que l’Alsace n’était pas à brader.Des candidats comme François Bayrou, en ont profité pour louer les spécificités de l’Alsace, son régime local excédentaire, sa langue, son histoire.
François Bayrou
Il faut faire très attention à vouloir imposer partout d’une certaine manière, comme un rouleau compresseur, le même modèle.Ces régions de l’Est ont vécu des drames historiques qui méritent qu’on les respecte.
David Meneu
On ne touche pas au Concordat, c’est aussi l’avis de Nicolas Dupont-Aignan qui prône un maintien absolu, le statut ayant, selon lui, fait ses preuves.Du côté d'Europe Ecologie Les Verts, Eva Joly ne voit aucune raison de le modifier puisque les Alsaciens y seraient attachés.La candidate Front National, elle, saute sur l’occasion pour défendre les origines chrétiennes de la France.Marine Le Pen n’est pas contre les subventions occultes en Alsace-Moselle, sauf s’il s’agit de l’islam.
Marine (le) Pen
Je ne veux pas qu’on l’élargisse à l’islam, et je ne veux pas qu’on intègre…
Sylvie Malal
Même si aujourd’hui, effectivement, la communauté musulmane est plus importante ben qu’en 1801, alors qu’on a créé la Concordat et c’est peut-être…
Marine (le) Pen
Oui, mais c’est-à-dire qu’il n’existait pas en 1801.Oui mais c’est parce qu’elle n’existait pas en 1801, justement, qu’elle ne doit pas pouvoir bénéficier de cette exception historique dont bénéficie, en l’occurrence, d’autres religions.
David Meneu
Si Jacques Cheminade ne s’est pas prononcé sur la question, à la gauche du PS en revanche, on ne cache pas une hostilité certaine au Concordat.Jean-Luc Mélenchon en tête, le candidat du Front de gauche apprécie le droit local et veut même l’étendre à toute la France, pour le Concordat c’est l’abrogation.
Jean-Luc Mélenchon
La France est une et indivisible.Cela signifie non seulement que ses frontières en font un tout un et indivisible, mais que la loi doit être la même partout.Et pourquoi est-ce qu’en Alsace-Moselle, on aurait un régime qui date de Napoléon !
David Meneu
La position du NPA est quasiment la même, Philippe Poutou refuse de subventionner les cultes et plaide pour une stricte laïcité.Quant à Nathalie Arthaud de Lutte ouvrière, elle constate qu’on supprime des postes d’enseignant en Alsace mais qu’aucun poste de curé, rabbin ou pasteur n’est remis en cause.La gauche du PS n’a peut-être pas fini d’enrager, si François Hollande devait appliquer son engagement, cela reviendrait probablement à conforter le Concordat en l’inscrivant dans la Constitution.
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