Croissance démographique relative et vieillissement de la population (2013-2050)
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Résumé
Dans une démarche de géographie prospective, les antennes régionales s’interrogent sur les évolutions démographiques de la région Grand-Est et annoncent une hausse limitée de la population régionale entre 2017 et 2050 ainsi qu’un vieillissement des Grand-estois.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
23 juin 2017
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Diffusé le 23 juin 2017, ce reportage, très court et très informatif, aborde les questions du faible dynamisme démographique régional dans le cadre d’une analyse prospective et celle du vieillissement démographique. L’étude du dynamisme démographique s’appuie sur l’analyse de critères objectifs : le taux de natalité, le taux de mortalité et le solde migratoire (différence entre les départs et les arrivées dans le territoire étudié). Selon l’INED, le vieillissement démographique consiste en « l’augmentation de la proportion de personnes âgées dans une population, en raison de la diminution de la fécondité, de la mortalité et de l’allongement de la durée de vie moyenne. »
Au regard d’une étude faite par l’INSEE, le journaliste affirme que « notre région passera de 5 millions 500 milles (5 552 800 sur l’infographie) habitants en 2013 à 5 millions 700 milles (5 705 800 sur l’infographie) habitants en 2050. » Ces données chiffrées prospectives sont obtenues par reproduction « des différentes tendances observées sur le passé récent », selon l’INSEE.
En effet, fin 2018, une étude de l’INSEE [1] confirme l’existence d’un taux d'évolution annuel moyen de la population entre 2011 et 2016 (en %) plus faible dans les départements du Grand-Est (à peine 0,1% de croissance) qu’à l’échelle nationale (+0,4%). Cette situation s’explique par un solde naturel (solde entre le taux de natalité et le taux de mortalité) nul, en Meuse, ou négatif (le nombre de décès dans l’année est supérieur au nombre de naissance) en Haute-Marne et dans les Vosges. Si cette situation perdure, elle peut expliquer la prévision énoncée dans le reportage qui estime que d’ici 2050 le département de Haute-Marne pourrait perdre près de 10% de sa population. Pour le département des Ardennes, la dépopulation s’explique par le plus mauvais solde migratoire de la région (-0,6% par an). Le faible dynamisme démographique grand-estois provient de ce manque d’attractivité des départements de la région. En effet, entre 2011 et 2016, seul le département de l’Aube connaît un solde migratoire positif (0,2%) tandis que celui du Bas-Rhin est quasiment nul. Partout ailleurs, le solde migratoire est négatif : -0,1% pour le Haut-Rhin, -0,2% pour la Marne, la Meurthe-et-Moselle et la Moselle, -0,4% pour la Haute-Marne et les Vosges, -0,5% en Meuse et -0,6% pour les Ardennes.
Dans une autre étude publiée à la fin de l’année 2017 [2], l’INSEE démontre, dans une comparaison des données entre les périodes 1990-2010 et 2010-2015, la détérioration du taux de variation démographique annuel dû au solde migratoire (c’est-à-dire une perte de 0,2 point ou plus) en Bas-Rhin, en Meuse et dans les Vosges. Néanmoins, la proximité avec la métropole parisienne a sans doute permis une amélioration (augmentation de plus de 0,2 point) de ce même taux pour les départements de l’Aube et de la Marne (même si en ce dernier département le solde migratoire reste négatif). Pour ce dernier département, l’ouverture de la LGV Est européenne en 2006 a probablement eu des impacts positifs sur cette question du solde migratoire et donc de l’attractivité.
Le faible solde naturel, voire le solde naturel négatif, engendre de fait un vieillissement de la population grand-estoise. Le reportage insiste dans sa deuxième partie sur ce vieillissement de la population régionale en s’appuyant sur le taux de vieillissement (part des plus de 65 ans, selon la définition de la vieillesse utilisée par l’OMS). Ce taux de vieillesse serait en 2050 de 28% contre 17% en 2013. Néanmoins, ce vieillissement de la population, s’il est réel en Grand-Est, est généralisé ; non seulement à l’échelle mondiale mais aussi à l’échelle nationale : au 1er janvier 2020, la France métropolitaine compte 20,73% de personnes de plus de 65 ans dans sa population. Il est à noter que le taux de vieillissement grand-estois est globalement inférieur à la moyenne métropolitaine. Malgré tout, le processus de vieillissement des populations est réel et concerne surtout les pays développés. Si aujourd’hui le monde compte 26% de jeunes (moins de 15 ans) et 9% de vieux (plus de 65 ans), en 2050 la part des jeunes devrait diminuer et celle des vieux légèrement augmenter. Le vieillissement de la population est une conséquence des transitions démographique, épidémiologique (voir les « quatre âges » de cette transition selon Emmanuel Vigneron (1990)), urbaine et culturelle, visibles à l’échelle mondiale. Ces quatre transitions participent au développement de la population mondiale et en favorise le vieillissement comme le démontre la situation des pays développés d’aujourd’hui, dont le Japon est l’archétype. En 2017 (au moment de la diffusion de ce reportage), ce pays possède déjà un taux de vieillesse de 28%. L'indice de vieillissement (rapport en pourcentage entre la population âgée de plus de 65 ans et plus et la population âgée de 0 à 14 ans) des pays développé est, en effet, élevé. En Italie, l'un des pays d'Europe et du monde le plus touché par le vieillissement, cet indice atteint 165 % (165 personnes de plus de 65 ans pour 100 enfants de 0 à 14 ans). Au 1er janvier 2020, cet indice de vieillissement était de 117% pour la France.
Néanmoins ces évolutions démographiques sont rattachées à des dynamiques extérieures évoquées dans le reportage, à savoir les vigueurs démographique et économique de centres situés hors la région : la métropole parisienne et la mégalopole européenne. S’ils connaissent une vigueur croissante et importante, alors la région Grand-Est (par le biais de ses départements alsaciens et mosellan ainsi que l’Aube et la Marne) consoliderait sans doute sa démographie. Mais s’ils connaissent des difficultés économiques et d’attractivité, alors la démographie régionale sera très probablement en berne et le scénario de population basse (avec une baisse de « 271 800 personnes entre 2013 et 2050 » pourrait être envisageable [3]. D’autant plus que selon Véronique Batto et Sophie Villaume [4], « au 1er janvier 2019, 5 525 300 personnes résident dans le Grand Est (…). En un an, la région a perdu 13 100 habitants, ce qui correspond à une baisse de 0,24 %. Dans le même temps, la population de la France métropolitaine a augmenté modérément (+ 0,13 %). En dix ans, entre 2008 et 2018, le Grand Est a gagné 17 000 habitants, soit + 0,03 % par an en moyenne, pour + 0,41 % en métropole. C’est l’une des évolutions régionales les plus faibles après celle de la Bourgogne-Franche-Comté. À l’inverse, c’est en Occitanie que le nombre d’habitants a le plus progressé (+ 0,81 % par an) ».
[1] Thibaut Martini, Vincent Nieto, « La croissance, déjà faible, de la population du Grand Est ralentit », Insee Analyses Grand Est, n° 89, 27/12/2018.
[2] Vincent Vallès, « Du nord au sud, les mouvements naturels et migratoires opposent les départements », INSEE Focus, n° 107, 27/12/2017.
[3] Anh Van Lu et Flora Vuillier-Devillers, « Des perspectives de croissance démographiques peu favorables », Insee Analyses Grand Est, n°45, 22 juin 2017.
[4] Véronique Batto, Sophie Villaume, « Toujours moins de naissances et plus de décès. Situation démographique en 2018 », Insee Analyses Grand Est, n° 109, 12/02/2020.
Éclairage média
Par
Ce reportage du 23 juin 2017 s’appuie sur un article publié la veille par Anh Van Lu et Flora Vuillier-Devillers « Des perspectives de croissance démographiques peu favorables », Insee Analyses Grand Est, n°45, 22 juin 2017, p. 4. qui proposent une démarche prospective et cinq scénarii aux causes et conséquences démographiques variables.
Dans le reportage, seul le scénario central est pris en considération. Le journaliste a fait le choix d’écarter les scénarii dit de « population jeune », peu probables en Grand-Est car il « suppose une hausse de l’indicateur conjoncturel de fécondité, des gains d’espérance de vie moins importants et un solde migratoire avec l’étranger plus excédentaire » ce qui provoquerait une augmentation « de 360 700 personnes entre 2013 et 2050 », et de « population haute » pour lequel les gains de soldes naturel et migratoire devraient être encore plus élevés. Pourtant, il n’est sans doute pas raisonnable d’écarter d’un revers de manche les deux derniers scénarii et surtout celui de la population âgée qui entraînerait une évolution « quasiment stable (diminution de 3 600 personnes) entre 2013 et 2050 », selon les autrices de l’analyse puisque des données statistiques sur les années précédentes ont démontré une certaine baisse de la population régionale (voir supra). Le scénario de population basse (avec une baisse de « 271 800 personnes entre 2013 et 2050 ») pourrait également être envisageable.
Cette courte séquence est composée d’images tournées dans les rues de Châlons-en-Champagne et de Troyes ainsi que d’infographies accompagnées d’une voix off. Elle centre son propos sur la faible croissance démographique en Grand-Est et en ex-Champagne-Ardenne (lieu de diffusion de ce reportage dans le cadre du journal télévisé de l’antenne régionale de France 3). Les informations chiffrées sont clairement présentées alors que le propos journalistique est efficace et grand public.
Manquent, néanmoins, nuances et précisions. Dans la première partie du reportage portant sur la question de la « croissance démographique en panne », une démarche très géographique (la démarche scalaire) est employée puisque les propos évoquent d’abord la région Grand-Est , puis l’ancienne région Champagne-Ardenne et enfin la situation département par département, mais aucun propos ne vient préciser les différences de croissance entre les zones urbaines (présentées en images dans le reportage) et les zones rurales (absentes des propos et des images).
Ensuite, le propos souligne, avec un regard prospectif, « la désertification dans les territoires les plus enclavés » ; or ces territoires enclavés ne sont ni définis, ni montrés, ni cartographiés il est donc impossible de savoir exactement à quoi fait référence le journaliste et quelles dynamiques il veut démontrer. D’autant plus que cette expression n’est pas employée dans l’analyse d’Anh Van Lu et de Flora Vuillier-Devillers, qui sert de référence au journaliste. Les analystes de l’INSEE évoquent, de leur côté, « les départements les plus isolés » (résumé).
De plus, le terme de désertification n’est pas clairement défini ; et il est peu probable qu’il corresponde dans la bouche du journaliste à la définition géographique – bien évidemment pas celle de la géographie physique qui n’a pas lieu d’être ici (dégradation des sols entraînant aridification puis extension des espaces désertiques – comme dans la bande saharo-sahélienne), mais pas non plus celle de la géographie humaine et sociale dans laquelle le terme est abandonné depuis plusieurs années au profit du terme de déprise. La déprise étant clairement définie en géographie comme « la diminution de l’intensité ou de l'extension d'une activité socio-économique dont les effets sont perceptibles dans l'occupation humaine de l'espace : déclin démographique et ses conséquences, paysages d'abandon, équipements obsolètes, etc.. » (Glossaire du site geoconfluences.ens-lyon.fr)
Au mieux, dans ce reportage, aurait-il fallu parler de dédensification pour les territoires urbains (puisqu’en Grand Est, les villes-centre de pôles urbains de taille moyenne (de 20 000 à 49 999 habitants) perdent globalement des habitants généralement au profit des espaces périurbains proches ou des autres communes de l’agglomération) [1] ou comme dans l’article scientifique de « déprise » (résumé et deux fois en p.4) pour les espaces ruraux comme conséquence immédiate des processus de vieillissement démographique et de dépopulation.
Toutefois, dans le cadre d’une information grand public, ce reportage trouve tout à fait sa place sur les antennes de France 3 en région par le caractère informatif et documenté de son fond.
[1] Thibaut Martini, Vincent Nieto, « La croissance, déjà faible, de la population du Grand Est ralentit », Insee Analyses Grand Est, n° 89, 27/12/2018.
Transcription
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