François Mitterrand inaugure l'opéra Bastille

13 juillet 1989
01m 50s
Réf. 00292

Éclairage

Le 13 juillet 1989, François Mitterrand lance les festivités de la semaine cruciale du 14 juillet du Bicentenaire. Il inaugure le nouvel Opéra Bastille.

La construction de ce nouvel Opéra est annoncée en 1982 par François Mitterrand. Il souhaite doter Paris d'une nouvelle salle d'art Lyrique "moderne et populaire". L'Opéra Garnier est jugé trop petit en jauge et trop limité techniquement. Le nouvel Opéra doit pouvoir accueillir 2700 personnes, ce qui en fait l'une des cinq plus grandes salles de spectacles lyriques au monde, derrière le Metropolitan Opera de New York (3800 places) et le Civic Opera House de Chicago (3600 places). Cette jauge considérable, associée à une offre tarifaire attractive, doit permettre de démocratiser l'art lyrique, symbole absolu de l'élitisme, en raison de ses coûts considérables de mise en oeuvre (orchestre, chanteurs, techniciens). De plus, François Mitterrand souhaite faire de ce bâtiment un lieu de commémoration de la Révolution française, à l'emplacement de la Bastille. Or, depuis 1969, et la mise en place du RER A, la gare de la Bastille est désaffectée. Elle est rasée en 1984. Les conditions semblent idéales pour réaliser l'un des grands monuments du Bicentenaire.

Cependant, ce chantier est loin d'être satisfaisant pour le président. Selon Michel Ragon, dans son Journal d'un critique d'art, "L'Opéra de la Bastille (...) est sans doute le seul réel échec parmi les projets architecturaux du Président". Le concours a intéressé de nombreux architectes de rang international mais aucun d'eux n'a réussi à proposer un projet original. Les membres du jury, déçus, choisissent en aveugle six projets et espèrent trouver parmi ces dessins anonymes, celui de l'architecte Richard Meier. Le choix en aveugle élit finalement un inconnu d'origine uruguayen, Carlos Ott. Faute de mieux, François Mitterrand se résout à contre-coeur à lancer le chantier de cette "Bastille sans génie". Le chantier est laborieux. L'opéra est inauguré le 13 juillet 1989 mais il n'ouvre définitivement au public qu'en mars 1990 en raison de multiples retards de travaux. De plus, les innovations dernier cri, comme le plateau central pivotant et amovible, qui doit permettre l'alternance de spectacles aux multiples décors, ne fonctionne pas. Il faut plusieurs années afin d'établir une acoustique acceptable dans l'ensemble de la salle. Enfin, les dalles de pierre agrafées à la façade menacent continuellement de tomber sur les passants.

L'inauguration, événement haut de gamme, a lieu le 13 juillet 1989 en présence de 33 chefs d'Etat (Margaret Thatcher, George Bush, Helmut Kohl, Brian Mulroney) et de plus de 2000 personnes issues des délégations internationales. Dernier arrivé, François Mitterrand, accompagné de Danielle Mitterrand, triomphe. Le spectacle d'inauguration, intitulé La Nuit avant le jour, éblouit les participants. Le metteur en scène américain Bob Wilson assure la mise en scène tandis que le français Georges Prêtre dirige l'orchestre. Les chanteurs et danseurs de statures internationales (Ruggero Raimondi, Barbara Hendricks, Manuel Legris) se succèdent dans une série de tableaux surréalistes nimbés des étranges lumières de Bob Wilson.

Sur le plan administratif, ce n'est qu'en 1994 que l'opéra Garnier et l'opéra Bastille fusionnent pour former une seul et même structure. Le premier devient le lieu privilégié des spectacles de danse et des concerts , tandis que le second devient le lieu des représentations lyriques. A la suite de Pierre Bergé et Hugues Gall, Gérard Mortier préside à la destinée de l'établissement qui s'impose comme l'une des scènes les plus innovantes du monde. Cette politique de création a connu un coup d'arrêt avec l'arrivée de Nicolas Joel en 2009 avant de connaître un nouvel essor avec la nomination de Stéphane Lissner en 2014.
Félix Paties

Transcription

Présentateur
Quelques heures plus tôt, c’était en fin d’après-midi, nous l’avons vu, l’un des temps forts de ce bicentenaire, l’inauguration de l’Opéra Bastille, l’un des chantiers voulus par François Mitterrand. Le Chef de l’État en avait pris la décision voici sept ans, l’Opéra Bastille est terminé mais il ne sera réellement en service, opérationnel que dans six mois. 30 Chefs d’État, 2000 invités étaient présents, et beaucoup, beaucoup de monde sur les trottoirs pour assister à l’événement, Michel Vial.
Michel Vial
Certes, le public de Paris était tenu à une distance plus que respectable, mais quel producteur aurait pu imaginer pour sa générale une assistance aussi prestigieuse, une salle aussi brillante. Ce sont, en effet, 33 Chefs d’État ou de Gouvernement, pas moins, qui ont inauguré avec éclat le dernier haut lieu de l’art lyrique. Autour d’eux, entre le parterre et les balcons, les membres des délégations étrangères, du Gouvernement, des corps constitués, mais aussi des invités du Chef de l’État et de l’Opéra de Paris, en tout cas tous triés sur le volet. Dernier arrivé et chaleureusement applaudi par les 2700 personnes présentes à cette soirée exceptionnelle, François Mitterrand, installé à la corbeille, au milieu des hommes et des femmes parmi les plus puissants de la planète. Sur la scène gigantesque et impressionnante, le gratin du chant lyrique, Ruggero Raimondi, Placido Domingo, Barbara Hendricks, entre autres, et deux étoiles françaises de la danse, Manuel Legris et Élisabeth Platel ; tous accompagnés par l’Orchestre du Théâtre National de l’Opéra dirigé par Georges Prêtre, dans un programme entièrement chanté en français, un programme ouvert et refermé sur La Marseillaise . L’Opéra Bastille a véritablement connu ce soir l’une de ces soirées historiques qui, des années durant, font la joie nostalgique des amateurs. Il a surtout donné les trois coups des festivités haut de gamme du bicentenaire de la Révolution Française.