Mai 1968 à Reims : histoire et mémoires
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Résumé
Trente ans après Mai 1968, le journal télévisé de France 3 Champagne-Ardenne revient sur les événements de l’époque : un reportage entre histoire et mémoires qui évoque principalement les actions ouvrières de la fin mai.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
15 mai 1998
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Contexte historique
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Barricades du Quartier latin, Dani le Rouge, la « chienlit » du président de Gaulle… ; en bref, Mai 1968. Pourtant, tout ne se fait pas à Paris et il existe une réalité provinciale et régionale de ces événements, y compris dans les villes ouvrières du Grand-Est et notamment la cité des sacres.
A Reims, ville ouvrière et estudiantine, comme presque partout ailleurs, les usines ont été bloquées. Des manifestations se sont déroulées et les étudiants se sont coordonnés pour revendiquer des droits et dénoncer le système élitiste mis en place jusque-là.
Traditionnellement, les historiens découpent la période de mai-juin 1968 en trois temps. Du 3 au 13 mai, c’est la période « étudiante » (avec la mise en place de la contestation autour du passage en conseil de discipline de sept étudiants de Nanterre – dont Cohn-Bendit). Ensuite, vient la période « sociale », par l’élargissement de la contestation à pratiquement tous les secteurs économiques avec la manifestation parisienne du 13 mai qui permet la convergence des luttes entre étudiants et ouvriers ce qui aboutit au 27 mai et à la signature des accords de Grenelle, au moment où l’on estime que le nombre de grévistes et/ou manifestants atteint pratiquement 10 millions – sur 50 millions de Français de tous âges. Enfin, intervient la période « politique » avec la dissolution de l’Assemblée nationale, le 29 mai, et les élections législatives du 30 juin. Cette chronologie est brièvement rappelée par le présentateur du journal télévisé : « au milieu du mois, le mouvement ouvrier s’ajoute aux manifestations étudiantes ». Puis la voix off du reportage évoque les deux manifestations du 30 mai, l’une issue du mouvement de contestation, l’autre en soutien à la politique gaullienne (15 à 20.000 personnes dont le conseil municipal).
Les images et témoignages démontrent l’importance de la contestation sociale au sein d’une ville ouvrière, puisque le journaliste, puis plus tard la voix off, signale qu’ « au plus fort de l’action, Reims compte quelque 25.000 salariés dans les rues » ; cette situation correspond à la manifestation du 23 mai qui rassemble les employés d’environ 120 établissements de la ville. Si ce nombre est important, la proportion (un peu plus de 16 % de la population) reste moindre qu’à l’échelle nationale (20 % environ). Trois jours plus tôt, ils étaient 17.000. Les premiers débrayages ont eu lieu le 16 mai, quand 1.000 ouvriers des Docks rémois (entrepôts commerciaux et transformation alimentaire, en images dans le reportage) cessent le travail, bientôt suivis de ceux des Comptoirs français (magasins à succursales multiples) puis ceux des usines Arthur Martin (électroménager, évoquées dans le reportage par les images et le témoignage), Remafer (construction ferroviaire), Chausson (pièces automobiles), des Biscuiteries rémoises (visibles dans les images et célèbres en leur temps pour la fabrication des « Déjeuners Rem »), etc.
Si le reportage se concentre sur les événements sociaux, les images rappellent, par des vues prises dans les amphithéâtres, l’existence de la contestation estudiantine qui revendique le soutien des étudiants rémois aux étudiants de Nanterre visés par les sanctions disciplinaires. Celle-ci a été réelle et les étudiants réunis en assemblée générale font entrer la politique dans les amphithéâtres, ce qui pousse à une plus grande organisation des étudiants rémois, comme le démontre la création, le 29 novembre 1968 du Groupe rémois des amis de Clio (GRAC) – association des étudiants en histoire de la faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’université de Reims –, par, notamment, Jackie Lusse et Jean-François Boulanger. Il en est de même à l’école régionale des beaux-arts et des arts appliqués de Reims, où les étudiants étaient très actifs et mobilisés, comme le souligne le départ précipité pour le service militaire d’Henri Heidsieck suite à la suspension de son sursis étudiant à cause, écrit-il, de « son implication dans les événements de 68 à l’école. » Le 6 mai, ce sont déjà 1.600 étudiants du Collège de droit et de Sciences (80 %), 1.000 du Collège littéraire qui suivent l’appel à manifestation lancé par l’AGER (Association générale des étudiants de Reims ; affiliée à l’UNEF) dont les membres dirigeants sont alors Alain Guiolet (président en exercice), Michel Silland (vice-président), Jean-Pierre Talbot et Jean-Claude Breton (anciens présidents).
Éclairage média
Par
Ce reportage se concentre sur la période dite « sociale » par le biais d’images d’archives fixes – généralement issues du fonds photographique du journal local L’Union –, de films d’époque et de témoignages réalisés à dessein. Le décentrage du regard (de Paris vers la province) porté sur ces événements de Mai 1968 est l’objectif premier de ce reportage diffusé dans le cadre du journal télévisé régional du 15 mai 1998 ; trente ans après les faits. Se positionnant entre histoire et mémoire, le reportage laisse une part belle au témoignage de deux syndicalistes de la CGT (Roger Nouvion et André Borchini), ce qui n’est pas sans poser question quant au biais mémoriel. Il eût été intéressant, mais sans doute cela n’a-t-il pas été possible, d’interviewer un ancien étudiant de l’université de Reims ou un représentant des forces de l’ordre stationné à Reims à ce moment-là, par exemple.
Le recours au témoignage, traditionnel et central dans la pratique journalistique – est néanmoins une pratique encore neuve dans les travaux historiques. Aussi, par ce reportage, les journalistes font œuvre d’historiens – peut-être à leur corps défendant puisque ce qui les intéresse sont les événements tels qu’ils ont eu lieu à Reims -, tandis que l’historien y trouvera une source intéressante pour étudier la mémoire de ce conflit social s’étant déroulé trente ans auparavant. Si le témoignage est, en effet, resté longtemps en marge dans la pratique scientifique de l’histoire, il est entré dans la sphère des sources historiennes grâce, notamment, au soutien des historiens de l’IHTP (Institut d’histoire du temps présent) fondé en 1978.
En donnant la parole à des acteurs du plus important mouvement social de l’histoire de France contemporaine, en illustrant leurs propos avec des images d’archives, le journal télévisé de France 3 Champagne-Ardenne joue pleinement son rôle d’information et de démocratisation de la culture et de l’histoire – notamment locales. Surtout, ce reportage qui écarte volontairement, et à juste titre, les événements parisiens, démontre la réalité de la contestation en province, si souvent négligée par les études historiques 'même si en l’espèce, les revendications rémoises diffèrent très peu des revendications parisiennes et en réalité nationale). L’intérêt est justement de montrer que la société française est, en grande partie, traversée par un mouvement d’opinion convergent bien que des opposants existent et se regroupent sous la bannière gaulliste dans les contre-manifestations du 30 mai.
Enfin, ce reportage permet de souligner la persistance du secteur industriel à Reims au moment de sa réalisation, puisque les témoignages de Roger Nouvion (Forbo Sarlino) et André Borchini (Arthur Martin – Electrolux) sont enregistrés dans les cours de ces deux entreprises de plus de 200 salariés chacune – même si depuis, le site d’Electrolux a fermé ses portes en 2005.
Transcription
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